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Ha’aretz, 29 mai 2006

Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant


Il y a une dizaine de jours, la yeshiva [[yeshiva : école talmudique]] d’Od Yossef Haï organisait une fête pour célébrer l’arrivée du premier rouleau de la Torah dans le bâtiment provisoire que la yeshiva nomme sa maison, sur une colline proche de la colonie de Cisjordanie d’Itzhar. Des centaines d’habitants d’Itzhar et de ses colonies sauvages attenantes participaient à la fête, avec chants, danses et prières à la clé.

A quelques centaine de mètres de là, une foire aux livres improvisée prit forme, avec la vente des meilleurs écrits idéologiques et religieux des rabbins de la région, dont ceux du rabbin Itzhak Ginsburg, le chef de cette yeshiva qui se situait auparavant sur l’emplacement de la Tombe de Joseph, à Naplouse.

Empilés au milieu d’ouvrages magnifiquement reliés, il y avait des tracts qui traitaient du sujet brûlant du jour. Certains étaient signés du mouvement « le’akev velimnoa » (« retarder et empêcher »), dont les militants, en majorité des jeunes, parlent de trois scénarios envisageables pour les futures actions des habitants des colonies dans la perspective des plans d’évacuation du gouvernement, peut-être dans un futur proche.

 Scénario 1 : le scénario d’Amona, où les colons arrivent à repousser les « forces de déportation » pendant un certain nombre de jours, dans l’esprit de la résistance d’Amona et de Kfar Darom. Le prix ? Des milliers de blessés. Le résultat ? L’évacuation quand même, et « un sentiment de frustration, d’amertume et de malheur dans la population ».

 Scénario 2 : « l’offensive défensive ». Des postes de défense sont érigés dans toutes les colonies, des volontaires s’engagent et sont postés sur le terrain. Tout est planifié, de l’équipement est stocké, un QG et un système logistique se mettent à fonctionner, des groupes de militants sont envoyés pour saboter les équipements de l’armée et pour empêcher ses mouvements. Ces actions ont une influence sur l’atmosphère générale du pays. Un hacker pénètre les ordinateurs de l’armée et les contamine par une série de virus. On trouve des laxatifs dans les réservoirs d’eau des bases militaires.

 Scénario 3 :  » -la défense offensive ». Instigation de nombreux points de friction entre Juifs et Arabes. De jeunes Juifs pénètrent de nuit dans des villages arabes et les mettent à sac, des combats éclatent à Lod, Ramlé, Haïfa, Wadi Ara et en Galilée (villes ou régions à population mixte judéo-arabe, ndt), les Arabes israéliens se lancent dans une troisième Intifada, et le plan de « déportation » [des colons] du gouvernement est repoussé aux calendes grecques.

La plupart des habitants des six colonies sauvages d’Itzhar rejettent ce type d’action, mais quelques-uns reconnaissent qu’ils ne contrôlent pas leurs jeunes et qu’ils sympathisent au moins au moins en partie avec eux. Yehouda Liebman, peut-être le plus célèbre de la zone autour d’Itzhar, a perdu son frère Shlomo lors d’un attentat perpétré il y a huit ans. Lui et sa femme Rachel habitent aujourd’hui à Givat Lehava, avec 11 autres familles. Cette colonie sauvage a été créée il y a 11 ans, environ à un km au sud-ouest d’Itzhar.

Liebman a entendu parler du mouvement « le’akev velimnoa » , mais il ignore qui est derrière et dément tout lien avec lui. Néanmoins, il admet comprendre leurs sentiments : « Je n’appelle personne à emprunter ce chemin, mais les sentiments exprimés dans ces tracts ? le travail de nos jeunes, peut-être ? je le comprends bien, et parfois, j’y adhère », dit-il. « Ils nous ont déclaré la guerre, et il n’y a que deux possibilités : soit nous acceptons le diktat, comme dans le Goush Katif (bande de Gaza), soit nous allons nous battre, sans bien entendu faire de mal à qui que ce soit. Comment précisément mener cette bataille ? Cela demande réflexion. »