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Haaretz, 26 novembre 2003


En avance sur l’Aid al-Fitr, la fete qui a commence hier et qui marque la
fin du Ramadan, le Premier ministre palestinien, Ahmed Qorei, a accorde des
interviews aux medias arabes et palestiniens. Dans tous ses interviews, on
l’a interroge sur sa rencontre prevue avec le Premier ministre Ariel Sharon,
et il a cite quatre conditions pour que cette rencontre soit une reussite.
La plus importante, a-t-il dit, est l’arret de la construction de la cloture
de securite. Mais cela n’est pas suffisant : « Israel doit demolir toutes les
clotures et tous les murs construits a l’interieur des territoires
palestiniens ». Pour autant que cela concerne la position palestinienne
officielle, Israel peut construire toutes les clotures qu’il veut, a
l’interieur de son propre territoire.

Le deuxieme condition est le gel de l’activite dans les colonies. La
troisieme est la levee des checkpoints et du siege de Yasser Arafat, et la
quatrieme est la liberation de prisonniers. Qorei a explique qu’il ne posait
pas de conditions prealables a une rencontre, mais que si Israel ne prenait
aucune initiative sur ces problemes, la rencontre avec Sharon deviendrait
inutile. Interroge sur son opinion a propos des mesures unilaterales en
discussion en Israel, il a repondu que sur tous ces sujets, il n’y avait
aucune necessite de negocier, mais qu’Israel devait tout simplement faire ce
qui etait necessaire. « Il n’y a aucune necessite de discuter sur l’arret de
la constructionde la cloture de securite, mais plutot, tout simplement, d’en
arreter la construction. »

Qorei connait parfaitement la position d’Israel, et sait que ces conditions
ne sont pas acceptables par le gouvernement israelien et qu’il n’y a aucune
chance que Sharon en accepte une. Alors, pourquoi Qorei tient-il ce langage?

La premiere raison, bien que moins importante du point de vue palestinien,
est l’image de la situation telle qu’il la percoit en Israel. Il a entendu
George Bush critiquer Israel depuis Londres, il connait l’action de
l’opposition en Israel, et, bien entendu, il est au courant du pacte de
Geneve, de l’initative la Voix des Peuples (d’Ayalon-Nusseibeh, ndt), et des
critiques emises par les quatre anciens chefs du Shin Bet et par le chef
d’etat-major. Hier, les medias palestiniens ont publie les details de la
premiere rencontre depuis le debut de l’intifada entre des representants
officiels du Parti travailliste et des dirigeants du Fatah : les deputes
Qadura Fares et
Hatam Abdul Qadr ont rencontre Shimon Peres lundi a Jerusalem et ont demande
que les travaillistes presentent une alternative au plan du gouvernement
Sharon, et ce le plus rapidement possible. Tout cela est percu comme des
pressions sur Sharon afin qu’il adopte une position plus moderee et qu’il
rencontre Qorei, et si Sharon est veritablement interesse par cette
rencontre, alors Qorei tente de fixer son prix.

Mais du point de vue palestinien, la raison la plus importante qui explique
la position de Qorei est la reprise, la semaine prochaine au Caire, du
dialogue entre les factions palestiniennes, c’est-a-dire entre l’Autorite
palestinienne et le Hamas. Le general egyptien Omar Suleiman sera le
mediateur du dialogue, dont l’ordre du jour comporte trois elements : la
formulation d’un plan politique palestinien unifie, la cooptation de
differentes factions palestiniennes qui entreraient dans le processus de
decision de la direction palestinienne, et, le plus important, la
preparation du cessez-le-feu avec Israel, la fameuse hudna. Une fois le
dialogue enclenche, Suleiman se rendra a Washhington pour informer les
Americains.

Avant d’entamer ces negociations, Qorei doit presenter une ligne dure. Des
images de lui aux cotes de Sharon, comme cela a ete le cas pour Mahmoud
Abbas, ne feraient qu’entraver ses efforts. Avant les vacances, il a donc
rencontre secretement (et de maniere inhabituelle) Ahmed Sa’adat, secetaire
general du FPLP, emprisonne et sous garde internationale a Jericho suite a
un accord avec Israel.

Cette activite du cote palestinien montre qu’il existe de serieuses
intentions en direction d’un cessez-le-feu et d’une reprise du processus de
paix. Mais il semble qu’au sein de l’opinion publique palestinienne, ceux
qui croient au succes soient peu nombreux. C’est Ziad Abou Amrou, un depute
de Gaza, qui l’a le mieux resume : Sharon ne prend que des mesures
tactiques, et la meme chose est vraie du Hamas, a-t-il dit. En d’autres
termes, tout cela n’equivaut qu’a des relations publiques, et a rien de
plus.