Stéphane JUFFA : “En Cisjordanie, par inertie, Netanyahou a laissé la situation sécuritaire se détériorer ces dernières années.

Dans le cadre des Chroniques pour la paix, émission bimensuelle sur Radio Shalom parrainée par La Paix Maintenant et JCall, Paul Ouzi MEYERSON s’entretient avec Stéphane JUFFA sur la situation en Cisjordanie.  Est-on face  à une troisième Intifada rampante ? Pourquoi un tel regain de tension cette année? Quel est le rôle de l’Autorité palestinienne ? Le nouveau gouvernement israélien saura-t-il  ramener le calme?

Stéphane JUFFA, israélien, est le créateur et rédacteur en chef de la « Metula News Agency », plus connue sous l’appellation : la MENA. Spécialiste des questions de défense et de diplomatie pour l’ensemble du Moyen-Orient, il a côtoyé la plupart des dirigeants israéliens, dont I. Rabin, ainsi que de nombreux responsables sécuritaires du monde arabe.


 

https://radioshalom.fr/podcasts/les-chroniques-pour-la-paix-175/chroniques-pour-la-paix-recoit-stephane-juffa-1409


Parlons d’un conflit quelque peu estompé, recouvert par les grondements de la guerre en Ukraine et, pour ce qui concerne Israël, par l’attente du futur gouvernement, déjà controversé, que concocte Benyamin Netanyahou.

Pourtant, ce conflit n’est pas si éloigné de nous, il se déroule aux portes de Jérusalem et en Cisjordanie, c’est-à-dire en Judée et Samarie. Depuis janvier 2022, les actions terroristes menées par des Palestiniens y ont tué 30 Israéliens. En représailles ou à titre préventif, l’armée israélienne a opéré plus de 2000 raids menant à l’arrestation de 2000 activistes et à l’élimination de 150 combattants de divers groupes palestiniens.

Depuis l’intifada Al Aqsa, la deuxième insurrection palestinienne en l’an 2000, on n’avait jamais connu un tel niveau de violence en Cisjordanie. Pourquoi cette situation , quelles en sont les raisons ?

Stéphane Juffa précise que la situation sécuritaire en Cisjordanie est «effectivement préoccupante mais qu’il ne s’agit pas d’une Intifada comme celle que l’on a connue auparavant». Il décrit les affrontements qui, depuis février 2022, opposent les forces spécialisées anti-terroristes de Tsahal aux groupes armés palestiniens qui cherchent à monter des opérations contre les civils israéliens. Chaque nuit, des commandos de l’armée s’infiltrent dans les villes palestiniennes pour appréhender les suspects, les stocks d’armes et les munitions.

Ces opérations sont plus importantes qu’auparavant pour deux raisons, estime le rédacteur en chef de la Mena. Premièrement, parce qu’elles sont destinées à endiguer la recrudescence des attentats contre les civils israéliens. Deuxièmement, parce que l’état-major de Tsahal a décidé, récemment, de ne plus laisser les groupes terroristes s’organiser et se développer «comme cela avait été le cas sous les gouvernements dirigés par Benyamin Netanyahou qui a laissé se constituer des zones de guérillas dans certaines villes palestiniennes, estimant que cela n’était pas gênant pour Israël. Mieux valait ne rien tenter car le phénomène restait limité à ces zones situées dans la sphère de l’Autorité palestinienne».

Stéphane Juffa pense que, même si cette confrontation demeure militairement de basse intensité, elle n’en reste pas moins inquiétante pour Israël. Il explique : «Ce qui assombrit la situation, c’est l’absence totale de réponse politique pour résoudre la confrontation avec les Palestiniens. De la gauche à l’extrême droite, pendant la campagne des élections à la Knesset, personne n’a émis la moindre idée à ce sujet. D’ailleurs, l’Autorité palestinienne ne trouve rien à proposer non plus. Cette absence d’initiative dure depuis près de quinze ans, depuis que Netanyahou est au pouvoir».

Stéphane Juffa énumère d’autres facteurs qui sont susceptibles d’aggraver la confrontation en Israël (Jérusalem) et en Cisjordanie (Judée et Samarie). D’abord, il cite la participation d’extrémistes juifs au nouveau gouvernement de Netanyahou : «Confier les forces de sécurité à des factieux qui attaquent les populations palestiniennes et les soldats de Tsahal et qui exigent de contrôler les décisions de la Haute Cour de Justice, c’est très dangereux». Ensuite, il évoque les profondes dissensions opposant l’Autorité palestinienne au Hamas, ainsi qu’au Djihad islamique, qui constituent une cause de grande instabilité et aussi une source de blocage à toute solution négociée.