Le rapport 2017 du Centre israélien pour la démocratie * sur les relations entre Juifs et Arabes montre leur refus d’être ennemis, sans rien omettre pour autant de la complexité et de la conflictualité qui caractérisent le relationnel entre eux.


Lettre d’information de La Paix Maintenant,  lundi 13 novembre 2017

Photo publiée dans le Jerusalem Post le 28 juin 2016  [DR]


L’éditorial d’Ilan Rozenkier

Nous aurions pu traiter, pour le déplorer, de la toute récente décision de créer 90 unités d’habitation dans le quartier de Gilo et 150 dans celui de Ramath Shlomoh à Jérusalem. Et même si, pour une fois, cette décision s’accompagne de la création de 44 unités pour les Arabes de Jérusalem-Est dans le quartier palestinien de Beith ‘Hanina. C’est certes une bonne mesure, mais insuffisante à compenser des années d’immobilisme et qui n’efface en rien celle qui porte atteinte à l’avenir.

Nous préférons cette fois nous attarder sur le rapport 2017 du Centre israélien pour la démocratie sur les relations entre Juifs et Arabes qui montre leur refus d’être ennemis, sans rien omettre pour autant de la complexité et de la conflictualité qui caractérisent le relationnel entre ces deux « tribus », pour reprendre le propos de Reuven Rivlin, composantes indissociables de la société israélienne.

Allant à l’encontre de l’idée reçue chez nombre de Juifs selon laquelle les Arabes israéliens ne se considèrent pas comme « faisant partie », les données révèlent que plus de la moitié d’entre eux au contraire ressentent cette appartenance. Ce n’est peut-être pas assez, mais cela reste notable.

Deux tiers sont fiers lorsque Israël remporte un succès, tel un prix Nobel. Si seulement 6% des Juifs parlent l’arabe, 69% des Arabes parlent couramment l’hébreu. En fin de compte, 77% veulent vivre  « ensemble », en Israël. Il n’en demeure pas moins qu’il est impératif de multiplier les ponts, les contacts et les échanges.

La majorité des Juifs israéliens considèrent que les Arabes aspirent à la disparition de l’État, ce qui provient sans doute du fait que 76 % d’entre eux récusent l’assertion selon laquelle Israël est l’État-nation du peuple juif. Ils y voient en effet la négation  de leurs droits et de leur enracinement. Á Israël de relever le défi de leur démontrer qu’ils peuvent y vivre à égalité de droits. En attendant, méfiance et incompréhension se traduisent par le refus d’accorder le droit de vote à qui s’oppose à cette définition, refus que partage la moitié des Juifs — dont plus de la moitié, pourtant, considère que les Arabes doivent être représentés à leur mesure dans la fonction publique. Mais, paradoxe ou incohérence, les deux tiers des Juifs s’opposent à la nomination de ministres arabes. Il est malgré tout un point sur lequel tous s’accordent : la reconnaissance d’une discrimination à l’encontre des Arabes.

Ainsi au niveau collectif, public, étatique, la situation n’est pas totalement satisfaisante. Loin s’en faut. Mais qu’en est-il au plan personnel ? 

Juifs et arabes se côtoient, travaillent ensemble et 95% d’entre eux, quelle que soit leur origine, considèrent que le relationnel est excellent. Qui plus est, un tiers des Juifs et la moitié des Arabes ont des amis chez « les autres ». Ainsi le niveau interpersonnel s’avère essentiel et c’est là que se trouve sans doute la clef d’un avenir partagé : se rencontrer, se connaître pour faire reculer l’ignorance — et la peur qui en découle.

Il importe de diffuser la qualité de la relation existant entre les personnes (sans l’enjoliver, sans nier racisme et violence) au niveau  de la société. Comme l’a dit le président de l’État en 2015 — « Créer un État juif et démocratique, cela veut dire faire exister une démocratie destinée non seulement aux Juifs, mais à tous ceux qui vivent sous la souveraineté de l’État d’Israël. Désormais, Israël compte environ 8 millions de citoyens : 6 millions de Juifs et près de 2 millions d’Arabes, de non-Arabes et de non-Juifs. Tous font partie de l’expérience israélienne, même si les Palestiniens israéliens sont tiraillés entre leur appartenance à l’État d’Israël et la loyauté envers leur peuple. »

* Résumé  anglais du document

 

L’Auteur

Sociologue et membre fondateur des Amis de Shalom Akhshav, devenus La Paix Maintenant,

Ilan Rozenkier a été élu président de l’association en 2014.