Arié AVIDOR est l’invité d’Ouzi Paul MEYERSON. A. AVIDOR a occupé plusieurs postes en tant qu’ambassadeur d’Israël en Europe puis dans différents pays d’Afrique. Aujourd’hui, il intervient comme consultant politique dans les médias israéliens et internationaux. Le thème abordé : Après la rencontre des présidents Herzog et Erdogan, s’oriente-t-on vers une nouvelle relation entre Israël et la Turquie ?

Pendant longtemps la Turquie, pays important de l’OTAN, a été un allié incontournable d’Israël : sur le plan économique, militaire, diplomatique, la collaboration était au mieux. Cette reconnaissance mutuelle contribuait à la stabilité et à la paix de la région.

Malheureusement, l’arrivée au pouvoir de l’islamiste Erdogan a sonné le glas de la lune de miel. Un sommet dans l’affrontement entre les deux puissances méditerranéennes a été atteint en 2010 lors de l’arraisonnement du navire turc, le « Marmara » venu soutenir le Hamas à Gaza. L’armée israélienne avait, alors, pris le bateau à l’abordage ! A bien d’autres occasions des conflits ont éclaté, notamment lorsque la Turquie d’Erdogan a donné asile à des hauts chefs du Hamas. De graves différents ont eu lieu également à propos de l’exploration et de l’exploitation du gaz en Méditerranée. Bref, il y a longtemps que les deux pays ont réciproquement rappelé leurs ambassadeurs, ce qui est un mauvais signe.

Mais peut-être que tout cela appartient désormais au passé ? Le président de l’État d’Israël, Itsrak Herzog a été reçu le 9 mars 2022 en grande pompe par le président turc Erdogan ! Pour quelles raisons a lieu ce rapprochement assez inattendu ? Est-ce réellement un retour aux années de fraternisation ou un petit pas timide en avant ? 


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Arié Avidor se félicite de l’accueil réservé par Erdogan et les officiels turcs au président d’Israël. “Il y avait des deux cotés une volonté de symboliser fortement la reprise des relations après plus de 10 ans de rapports exécrables entre les deux pays qui avaient rappelé leurs ambassadeurs depuis 2010”, constate l’ancien diplomate.

Arié Avidor attribue le désir d’Erdogan de relancer la coopération avec l’État hébreu à la difficile situation de la Turquie sur plusieurs plans. “Le pays connaît une grave crise économique et monétaire, la livre turque est en déconfiture et l’inflation supérieure à 50%. Il est isolé sur le plan diplomatique et subit les sanctions de l’Union Européenne suite à ses explorations indues de recherche de gaz dans les eaux chypriotes. Il est également en butte aux sanctions américaines pour avoir acheté des missiles russes anti-aériens  au détriment des systèmes de défense de l’OTAN”, souligne celui qui fut ambassadeur d’Israël.

Arié Avidor pense qu’Erdogan et l’administration turque essayent de profiter du nouveau contexte international, provoqué par la guerre menée par Vladimir Poutine contre l’Ukraine, pour améliorer sa position diplomatique. “Erdogan a besoin d’Israël dans beaucoup de domaines. Les échanges entre la Turquie et l’État hébreu sont très élevés, plus qu’entre Israël et la France, par exemple. Le paradoxe, c’est qu’alors que les relations politiques se détérioraient, les relations économiques n’ont jamais cessé de s’améliorer”, rappelle  Arié Avidor.

L’ancien ambassadeur d’Israël subodore qu’Erdogan, en améliorant ses rapports avec l’État hébreu, souhaite également se rapprocher des États-Unis. “La Turquie a besoin d’investissements dans tous les secteurs et notamment ceux du transport de l’énergie qui sont essentiels dans ses relations avec l’Europe“, explique Arié Avidor.

Au cours de la rencontre Erdogan-Herzog, aucune résolution n’a été prise mais des rendez-vous ministériels ont été programmés rapidement entre les deux pays. Arié Avidor précise cependant que “la condition préalable, que tous ont bien compris, à la reprise des relations entre les deux pays, c’est la mise en sourdine du soutien de la Turquie au Hamas palestinien, tant au niveau politique qu’au plan financier et militaire”.

Dernier point important soulevé par l’ancien ambassadeur : “même si la reprise des relations entre Israël et la Turquie ouvre la voie à une nouvelle ère de stabilité dans la région, elle ne se fera absolument pas au détriment des liens stratégiques noués entre l’État hébreu et ses voisins Grecs et Chypriotes”.

Mis en ligne le 2 avril 2022