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Haaretz, 4 fevrier 2004


Pour la premiere fois, le premier ministre Ariel Sharon a detaille son plan
de retrait de Gaza. D’apres ce plan, Sharon compte evacuer 17 colonies et
rapatrier leurs 7.500 habitants en Israel. Il compte egalement evacuer trois
autres colonies en Samarie. Sharon a ete clair : son intention est de
« demenager des colonies des endroits ou elles nous causent des problemes, ou
des endroits ou nous ne resterons pas dans le cadre d’un accord definitif »,
ajoutant qu’il avait deja ordonne la planification de ces evacuations, y
compris dans leurs aspects techniques, financiers et juridiques.
Cette publication a seme le trouble sur l’echiquier politique. A droite, on
menace deja de faire chuter le gouvernement, et on invoque la trahison des
valeurs. A gauche, on doute fortement des declarations du premier ministre.
L’Autorite palestinienne a elle aussi exprime son scepticisme, attribuant
les plans de Sharon a une operation de relations publiques avant sa
prochaine visite a Washington.

On ne peut blamer ceux qui ne prennent plus au serieux les declarations
d’Ariel Sharon. L’experience a enseigne aux Israeliens comme aux
Palestiniens qu’il y a un large fosse entre ce qu’il dit et ce qu’il fait,
et on peut se montrer sceptique sur la facon dont 20 colonies pourraient
etre evacuees, alors que les avant-postes illegaux ne l’ont pas encore ete.
Le laps de temps evoque est egalement assez long : entre un et deux ans,
soit le temps que Sharon estime necessaire pour executer son programme, ce
qui n’indique pas une determination sans faille.

Mais les paroles de Sharon ont une importance capitale, car elles denotent
un changement de fond par rapport aux principes qui ont guide toute son
action au gouvernement jusqu’aujourd’hui. Son plan ne considere plus toute
colonie comme une forteresse qui ne peut etre abandonnee. Il comprend qu’une
colonie peut etre un fardeau, et qu’on peut la quitter quand elle « pose des
problemes a Israel ».

Sur le plan ideologique, Sharon a reduit le concept du Grand Israel aux
portions de territoire qu’Israel souhaite garder, le reste etant des zones
ou ‘Israel ne restera pas, de toute facon ». De fait, il declare donc que les
aspects pragmatiques l’emportent sur les aspects ideologiques, et que
l’entreprise de colonisation elle-meme est negociable. Les conditions qu’il
avait lui-meme posees (pas de retrait sans accord de paix, pas de retrait
sous le feu) ne tiennent donc plus.

Ce qu’a dit Sharon est de la plus haute importance, parce ce que sont les
mots d’un premier ministre dont le nom a ete associe de pres a l’entreprise
de colonisation, et qui s’exprime du plus profond de ce qu’est la droite
aujourd’hui. En tant que tel, Sharon donne le signal de depart d’un
processus de ponderation, fonde sur le changement de l’opinion publique.
Ainsi, il apporte sa pierre a la fondation qui permettra a tout dirigeant
desireux de negocier avec les Palestiniens, et voudra discuter du
demantelement des colonies.

Meme si Sharon traine les pieds, et meme si son plan n’est applique qu’en
partie, on peut etre satisfait de ce que lui, l’ideologue, ait montre la
voie. Maintenant, il faudra suivre de pres la facon dont il se comportera,
pour voir s’il a la capacite, politique et pratique, de traduire ses
declarations en actes.