[article en anglais sur le site d’Haaretz->
http://www.haaretz.com/hasen/pages/ShArt.jhtml?itemNo=301382&contrassID=2&subContrassID=4&sbSubContrassID=0&listSrc=Y]


« J’espere que Sharon n’evacuera pas un seul avant-poste. J’espere que
deux cent cinquante mille Juifs de plus s’installeront dans les
Territoires. » Ces mots ne viennent pas d’un membre du Conseil de Yesha
[qui regroupe les representants des colons installes en Cisjordanie –
Yesha est l’acronyme de Yehudah et Shomron : la Judee et la Samarie] ;
ils ont ete prononces par Michael Tarazi, l’un des conseillers des
negociateurs palestiniens. Il ne croit plus possible de parvenir a un
accord par un partage territorial sur la base des frontieres de 1967. Si
cela ne dependait que de lui, l’Intifada serait finie depuis longtemps –
et n’aurait meme jamais commence.

Il est convaincu que d’ici une dizaine ou une vingtaine d’annees le
monde imposera a Israel le systeme d’une personne/un vote. Arrivera
alors au sionisme ce qui est arrive au regime d’apartheid en Afrique du
Sud – un Palestinien sera elu a la tete de la nouvelle entite existant
dans les frontieres de 1947.

Les propos de Tarazi devraient ouvrir les yeux de nombreux Israeliens
auxquels les declarations du Premier ministre Ariel Sharon (si
importantes soient-elles) concernant un État palestinien et le
demantelement de quelques colonies ont donne espoir. Moins de trois ans
se soient ecoules depuis qu’un Premier ministre israelien a fait aux
Palestiniens « l’offre la plus genereuse qui leur ait jamais ete faite ».
Tout ce qui en reste, c’est Ehud Barak pretendant que cette offre
genereuse avait pour seul but de montrer « le vrai visage d’Arafat » – et
le terrorisme, et le desespoir.

Il semble que les Israeliens se refusent a perdre une occasion de dire
que les Palestiniens ne perdent jamais une occasion de perdre une
occasion. Deux ou trois sommets mensuels ou annuels plus loin, quand
les Palestiniens auront rejete « l’offre genereuse » de Sharon de la
moitie de la Cisjordanie, le Premier ministre dira qu’il a devoile le
vrai visage d’Abu Mazen. Quand la Feuille de Route aura connu le sort
des documents precedents et que la terreur aura repris, Amos Gilad dira
qu’Abu Mazen n’etait rien de plus qu’un Arafat rase de frais.

Pour eviter d’autres deceptions, il est conseille de conserver
precieusement ces quelques lignes du colonel de reserve Ephraïm Lavie,
ancien chercheur attache au Renseignement militaire et conseiller aux
Affaires arabes du « gouvernement de paix » d’Ehud Barak. Lavie soutient
qu’Abu Mazen, comme Arafat et n’importe quel autre Palestinien digne du
nom de « dirigeant », est fidele a la decision de 1988 par laquelle le
Conseil national palestinien a adopte la resolution 242 du Conseil de
securite des Nations Unies et veut un État palestinien a côte d’Israel.
« La conception des Palestiniens etait et demeure que les negociations
ont pour but le plein accomplissement de leurs droits – tels qu’ils
decoulent de ce qu’ils nomment la ‘legalite internationale’ et non de
leur asymetrie avec Israel. »

Lavie souligne qu’en ce qui concerne les Palestiniens, sans satisfaire a
ces droits nulle offre ne saurait etre bonne. Une « bonne offre » ne
pourrait donc etre que l’application des droits decoulant des decisions
des Nations Unies et la volonte de les adapter a la realite actuelle,
avec des ajustement de frontieres correspondant aux blocs de colonies.
C’est precisement pour cette raison qu’ils ont rejete l’idee d’un accord
cadre : ils considerent en effet que le cadre est donne par les
decisions des Nations Unies. C’est egalement la raison pour laquelle,
lors des secondes negociations de Camp David, les Palestiniens n’ont
propose aucune solution au probleme de Jerusalem et du Mont du Temple,
alors qu’Israel en suggerait vingt-six.

Cela confirme le message de Tarazi : la paix ne se marchande pas.
L’echange de territoires est la seule concession au retrait sur les
lignes de 1967, y compris Jerusalem Est . De leur point de vue, les
Palestiniens ont d’ores et deja renonce a 78% du territoire originel.
Non plus qu’il ne saurait y avoir deux accords – un sur les territoires
et un sur les refugies – pour le prix d’un. Le seul marche est une
solution mutuellement acceptee au probleme du droit du retour qui ne
nuirait pas a l’equilibre demographique.

Il n’y aura pas non plus de paix a credit – chaque jour d’occupation qui passe ne fait que renforcer l’ardeur de ses opposants. C’est ainsi et pas autrement : le plat vous plait, mangez-le, et vous aurez deux États pour deux peuples ; le plat vous deplait, laissez-le, et vous solderez le sionisme avant liquidation.