Les derniers attentats terroristes perpetres par le Hamas, en meme temps que
les ruses d’Arafat, contribuent efficacement a annihiler Abou Mazen en tant
que Premier ministre palestinien, et a empecher l’application de la feuille
de route.

Ariel Sharon, de son cote, participe a cette dynamique negative en ne
prenant aucune mesure pratique pour faciliter la vie d’Abou Mazen et de
Mohammed Dahlan. Il consacre tous ses efforts a se montrer le plus evasif
possible face aux Americains. En annulant son voyage a Washington, Sharon
s’est offert encore un peu de temps.

Il faut apprehender la nouvelle vague de terreur du Hamas dans la
perspective plus large de ses objectifs strategiques. Elle est bien entendu
destinee a tuer des Israeliens, mais aussi a frapper Abou Mazen et Dahlan
avant qu’ils progressent dans la reorganisation de l’Autorite palestinienne.
Elle est aussi destinee a creer une situation ou aucun accord de paix n’est
possible, et a renforcer la position du Hamas dans ses relations avec
l’Autorite palestinienne, surtout par rapport a Abou Mazen et a ses plans de
« lutte contre le terrorisme ». Le Hamas ne le fait pas seulement en envoyant
des kamikazes, qui peuvent relativement facilement penetrer en Israel depuis
les territoires, mais aussi en tirant des fusees Qassam sur les villes
israeliennes a partir de la Bande de Gaza, entierement cloturee. Resultat a
ce jour : le Hamas dicte la nouveau scenario, et les autres acteurs n’ont
que des roles secondaires.

Arafat reussit a perturber le controle d’Abou Mazen et de Dahlan, ainsi que
celui des organisations de securite palestiniennes officielles. En plus de
controler personnellement cinq branches de l’appareil de securite de
l’Autorite, Arafat a decide dernierementde nommer l’un de ses fideles au
poste de chef de la securite preventive pour la Cisjordanie, sans consulter
Abou Mazen ni Dahlan au prealable.

Quand Dahlan a ete nomme ministre de l’Interieur, avec l’autorite sur la
securite preventive en Cisjordanie, le chef des services de la securite
preventive, Zohir Manasra (nomme par Arafat apres la demission de Djibril
Radjoub) a demissionne. Aujourd’hui, Arafat a remis les pendules a l’heure,
et en depit des regles stipulant que les nominations en matiere de securite
ne sont efectuees que par Abou Mazen et Dahlan, il a retabli Manasra a son
poste. Arafat s’est assure qu’il resterait en charge de la « guerre au
terrorisme ». Cette nomination fait douter de la possibilite qu’Israel puisse
un jour cooperer avec les services de securite preventive en Cisjordanie.

Pour l’instant, Sharon s’est contente de « declarations positives » sur les
roles d’Abou Mazen et de Dahlan. En pratique, Israel n’a pris aucune mesure
importante pour leur faciliter les choses. Sharon est mu par son desir de
gagner du temps, et d’eviter une situation ou il aurait a evacuer les
avant-postes illegaux sous la pression. Sharon est d’accord avec son
ministre de la defense Shaul Mofaz (qui declare que la feuille de route
n’est pas dans l’interet d’israel), mais ne veut pas stopper les
conversations steriles avec Abou Mazen.

Mofaz espere une situation qui rendra possible l’expulsion d’Arafat, mais il
semble oublier qu’une approche dure envers le leader palestinien obligerait
Abou Mazen a faire ses bagages en meme temps qu’Arafat. Tsahal reflechit
d’abord en termes tactiques, et ne comprend pas que sa puissance militaire
massive ne garantit en rien, en pratique, de dissuader les terroristes.
Certains, au sein de Tsahal, proposent une approche strategique differente,
mais ils sont en minorite.

Pendant ce temps, le Hamas, avec le Jihad islamique et le Fatah, dictent les
evenements. Malgre les coups qu’ils ont subis de la part d’Israel, et les
milliers de prisonniers, le terrorisme continue, exactement comme pendant
les mois qui ont precede l’Operation Rempart.