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Yediot Aharonot, 20 février 2006

Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant


Depuis un mois, nos meilleurs cerveaux spécialistes de la sécurité
débattent de ce que nous devons faire à propos du Hamas. Ils ont organisé
des forums, se sont assis autour de tables, analysé les informations
fournies par les services secrets, discuté de la situation, imaginé des
scénarios, publié des informations et des statistiques, fait des
prédictions.

A la suite de quoi, ils ont trouvé une solution révolutionnaire à la
situation que constitue un gouvernement Hamas : assiéger la population et
provoquer la chute du gouvernement. Cela ne vous rappelle pas quelque
chose?

Ce même groupe d’experts a déjà vaincu le Hamas. Ses communicants nous ont
répété à l’envi que le Hamas était décapité et qu’il était au bord de
l’effondrement. Or, nous voici avec ledit Hamas qui se retrouve, le
sourire aux lèvres, à la tête de l’Autorité palestinienne.

Ce même groupe d’experts ès sécurité a, au début de la deuxième intifada,
développé le concept du « levier économique », produit de l’ex chef d’état
major Moshe Yaalon, qui était censé forcer Yasser Arafat à renoncer aux
moyens terroristes, confronté qu’il serait aux grognements de la
population civile qui souffrirait tous les jours.

Et on répète les mêmes erreurs

Les gouvernements israéliens ont toujours (sauf dans le cas quelque peu
exceptionnel du gouvernement Rabin), avec la coopération énergique et très
efficace de l’armée, tenté de persuader les Israéliens que la logique
palestinienne est différente de la logique israélienne, différente, en
fait, de la logique humaine.

Alors qu’en Israël, les attentats palestiniens, les incitations à la haine
et les frappes de toutes sortes ont provoqué de la haine et fait monter
notre désir de vengeance, le fait de rendre impossible la vie des
Palestiniens était donc censé renforcer les modérés en leur sein.

Oubliez ce que votre instituteur vous a appris (cercle vicieux de la
violence, la violence appelle la violence, etc.) : les bouclages à
répétition, les incursions de l’armée, les arrestations et les check
points vont amener les Palestiniens à la modération. Ils vont accepter
joyeusement la supériorité d’Israël, ils vont marcher à quatre pattes en
chantant la Hatikva (hymne national israélien, ndt).

Envisager les alternatives

Un petit noyau aux idées différentes, dont Giora Eiland, conseiller à la
sécurité nationale, propose d’attendre un peu et de réfléchir à la
réaction israélienne avant de réagir. Mais ces idées ont été avalées par
un establishment sécuritaire qui a tendance à faire la seule chose qu’il
sache faire : la force, beaucoup, et tout de suite.

Un siège économique de l’Autorité palestinienne en 2006 serait une
démonstration de force particulièrement brutale. Il ne mordrait pas sur le
budget films de l’Autorité palestinienne (pour ceux qui souhaitent se
débarrasser des auteurs de « Paradise Now »), ni sur le budget jardins
publics de la municipalité de Ramallah. Mais il ferait mal, concrètement
et physiquement, à des centaines de milliers de personnes, enfants comme
adultes, qui devraient se débrouiller avec de moins en moins de
nourriture, et ne pourraient plus de payer de médicaments.

Cela, bien entendu, va renforcer leur amour pour Israël, leur modération
et leur désir de paix.

A qui la responsabilité?

Mais pourquoi se plaindre des militaires? La véritable responsabilité
appartient aux dirigeants politiques qui, à chaque crise, se tournent vers
nos experts ès sécurité et appliquent leurs recommandations à la lettre.

Car qui oserait, en particulier à la veille d’élections, envisager des
solutions non agressives? Qui oserait penser que, peut-être, peut-être
seulement, la logique et la compréhension se trouvent ailleurs que dans les
bureaux du ministère de la Défense?

Il semble que, au bout du compte, nous allons être forcés d’aller au clash
avec le Hamas. Mais nous ne saurons jamais si ce clash était inévitable,
si les choses auraient pu être différentes. Car le gouvernement israélien
refuse d’envisager toute autre option que celle de galoper vers le clash.

Les souffrances que nous infligerons aux Palestiniens, la pauvreté et la
faim, ne vont pas les monter contre leurs dirigeants. Les Palestiniens vont
se souder autour de leurs « leaders forts » pour s’opposer à l’occupation.
Et quand viendra le clash, nous aurons face à nous, non pas une société
palestinienne divisée entre ceux qui sont en faveur du dialogue et les
partisans les Hamas, mais une société unie qui n’aura rien d’autre à
perdre que ses chaînes.