Yediot Aharonot, 7 avril 2010

[->http://www.ynetnews.com/articles/0,7340,L-3872258,00.html]

Traduction : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant


Après avoir patiemment écouté la conférence de son invité, Obama répliqua à Netanyahou ce qui suit : Je vous comprends, vous les Israéliens, et c’est pourquoi je suggère que nous établissions un calendrier qui nous oblige, pour résoudre le conflit entre vous et les Palestiniens. Je suis déterminé à en terminer pas plus tard qu’un an avant la fin de mon mandat. Plus de 40 ans ont passé depuis que vous occupez les territoires, et il n’y a aucune raison de prendre du retard ni de perdre encore du temps. Chacun sait à quoi ressemblera un accord final. Vous aussi. George W. Bush l’a adopté et Bill Clinton en a souligné les détails. En tant que président noir aux origines musulmanes, je peux obtenir bien plus des Arabes que mes deux prédécesseurs. J’attends donc de vous, M. le Premier ministre d’Israël, que vous fassiez preuve de courage et que vous meniez votre pays vers la paix, dès 2011. Le gel de la construction dans les colonies est nécessaire, et n’est qu’un début. Entre-temps, je vais vous faire cette promesse : moi président, l’Iran n’aura pas l’arme nucléaire. Je le jure. Dieu vous bénisse, M. Netanyahou, et Dieu bénisse le peuple d’Israël.

A ces mots, Netanyahou fut abasourdi. Une semaine plus tôt, il avait refusé de suivre l’avis de son ministre des finances, Youval Steinitz, qui lui conseillait de ne pas se rendre aux Etats-Unis. Au lieu de cela, il s’était laissé tenter par Ehoud Barak, ministre de la défense, qui, comme toujours, lui promettait un entretien agréable et amical avec Obama. Ses conseillers l’avaient préparé à un clash sur la construction à Jérusalem-Est. Il était arrivé à la Maison-Blanche équipé de bonnes explications. Mais il n’était pas préparé à entendre de la bouche du Président une exigence ferme et sans équivoque d’en terminer avec les négociations (qui n’ont d’ailleurs pas commencé) dans un délai d’un an et demi. Il sentit la terre glisser sous ses pieds. Ses prévisions et ses analyses s’écroulaient.

Les gens qui s’étaient entretenus avec Netanyahou avant les élections peuvent témoigner de sa position du moment. Il se considérait comme l’homme choisi par l’Histoire pour une seule et unique mission : libérer Israël de l’horreur que représentait la bombe nucléaire iranienne. Il ne liait pas l’engagement des Etats-Unis contre l’Iran à un accord avec les Palestiniens. Avec une conviction totale, il défendait l’idée que le conflit était résolu de facto et que la situation créée dans les territoires occupés était la solution. Car voyez ce que nous avons : un parlement palestinien existe déjà, ainsi que des élections palestiniennes, un premier ministre palestinien, un drapeau palestinien, un code postal palestinien, une police palestinienne. Ils ont une autonomie pleine et entière. Presque un Etat.

Obama concentré sur ses objectifs

Netanyahou avait fondé de grands espoirs sur le progrès de l’économie palestinienne et sur le renforcement de ses institutions. Par des actes et non par des slogans. Le processus diplomatique (soit la voie royale qui ne conduisait nulle part et qu’avaient choisie ses prédécesseurs) lui paraissait comme une diversion inutile. Une sorte de rituel. Son existence ne l’enthousiasmait pas outre mesure, mais il était prêt à y participer pour faire semblant. Car à son avis, que beaucoup partageaient, les développements démographiques et politiques (un demi million d’Israéliens vivant au-delà des frontières de 1967, l’Etat du Hamas à Gaza) empêchaient et annihilaient toute idée d’accord final.

Le sentiment de dégoût envers le « processus diplomatique » a décidé Tom Friedman, écrivain et journaliste, à appeler Obama à s’abstenir de tout engagement américain dans les pourparlers israélo-palestiniens, au moins tant que les parties ne seraient pas prêtes à la moindre concession mutuelle. Jusqu’il y a environ 2 mois, il semblait que l’administration de Washington suivait l’avis de Friedman et que l’approche de Netanyahou faisait ses preuves. Car Obama envoyait des signes de d’impuissance volontaire.

Puis sont survenus le choc, la consternation et la pression. Soudain, Netanyahou trouvait en face de lui un président américain concentré sur ses objectifs. Un président qui agite le doigt devant le premier ministre et lui dit : « M. Netanyahou, pour frapper l’Iran, j’ai besoin d’un accord en Palestine. Le temps des manœuvres dilatoires est terminé. C’est soit la paix maintenant, soit vous payez maintenant. »

Quand Salam Fayyad, le plus modéré et le plus pro-américain des premiers ministres que les Palestiniens auront jamais, a déclaré à Pâques que bientôt, son peuple célébrerait la création de son nouvel Etat, qui serait reconnu par le monde entier et par Israël, avec Jérusalem pour capitale, c’était Barack Obama qui parlait par la bouche de Fayyad. Car les deux hommes partagent la même vision des choses.

Maintenant, Netanyahou comprend. Maintenant, il doit, soit prendre une décision, soit s’en aller.