Les retombées dans les media arabes de l’attaque menée contre l’école Ozar haTorah ont été citées en Israël sur YNet, qui note en chapô : « Les tirs meurtriers de Mohamed Merah ont soulevé une controverse en ligne au sein du monde arabe. L’empathie de la couverture internationale a conduit un reporter à soutenir que « le sang israélien vaut toujours plus cher ». »

Certes, mais nous le verrons dans le corps de l’article, cette perception est loin de faire l’unanimité dans la presse arabe – et l’initiative de la version en ligne de Yedioth Ah’aronoth, qui donne au public israélien une vision non unilatérale de l’opinion arabe, nous paraît à saluer.


Les tirs assassins de Mohamed Merah, lundi, contre l’école Ozar haTorah ont suscité une controverse dans les media arabes. De nombreux journalistes et blogueurs ont fait entendre leur opinion concernant cette attaque meurtrière, et tandis que certains la condamnent avec force, d’autres dressent des comparaisons entre Toulouse et Gaza.

Un journaliste algérien connu pour sa rhétorique anti-israélienne a publié un article intitulé : « Le sang israélien vaut toujours plus cher. » Il s’y demandait pourquoi le monde s’enflammait suite à l’assassinat de quatre Israéliens à Toulouse, alors que les incidents qui avaient vus trois soldats français tués dans le Sud de la France étaient passés au second plan. Il prétendait que c’était du fait que deux des soldats étaient des musulmans d’origine marocaine et le troisième des Antilles [1].

Il poursuivait en critiquant l’attitude générale à l’encontre des attaques de l’aviation israélienne contre la bande de Gaza par rapport aux tirs à Toulouse, accusant les media internationaux de négligence dans la couverture de la mort « barbare » de dizaines de victimes palestiniennes à Gaza, dont des enfants.

L’auteur mentionnait le soldat américain qui avait tué par balles 16 citoyens afghans la semaine passée, et notait que Washington s’était contenté d’un message laconique où l’incident était qualifié de « malheureux ».

Selon ce journaliste algérien, « l’influence du lobby sioniste a réussi à s’acquérir la protection de personnalités politiques et des media de par le monde, qui se sont mis à ne plus rien voir que par le prisme de Tel-Aviv ou celui de Washington, son allié : en fonction de la logique de la « sécurité d’Israël », de « l’antisémitisme » et du « terrorisme islamique » ».

Il admettait cependant que les Arabes étaient en partie coupables de cette situation : « La dernière observation porte, hélas, sur la désintégration de l’unité spirituelle des Arabes et des musulmans après que leurs intérêts ont commencé à s’opposer, et le nombre de leurs patrons à grossir. En fin de compte, peut-être allons-nous constater que nous-même sommes la cause de la dévaluation du sang arabe et musulman », écrivait-il.

« Le tueur porte préjudice à l’islam et aux Arabes de France »

Malgré ces imprécations il y eut des voix, elles-aussi venues d’Algérie, pour faire entendre un autre son et exprimer leurs condoléances. C’est ainsi qu’un blogueur mit sur les réseaux sociaux les photos des victimes juives, écrivant : « Le jeune rabbin a été assassiné avec ses deux enfants en bas âge et une autre fillette, en un crime qui porte toutes les marques de la haine et de l’antisémitisme. Dieu bénisse leurs âmes. »

Dans le même esprit, le journal arabe Al-Hayat, basé à Londres, publia sous la plume de Randa Takkiedine un article intitulé « Le massacre de Toulouse » [2]. La rédactrice y posait clairement que « si c’est l’œuvre d’une personne d’extrême-droite de tendance pro-nazie, c’est un acte dément et non de l’antisémitisme, mais un crime contre l’humanité ».

« Si le tueur est un extrémiste musulman de la mouvance violente, observait-elle encore, alors c’est un crime contre l’humanité – qui ne vise pas seulement les Juifs, mais aussi l’islam, le christianisme et l’ensemble des religions du monde. »

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NOTES

[1] Ses si bonnes intentions induisent le journaliste algérien en erreur : l’un des trois soldats, comme on l’a vu au moment des funérailles, se trouvait être catholique.

2] On peut trouver une version de cet article sur le site du journal en langue anglaise. Voir Randa Takkiedine, « The Toulouse Massacre », Al-Hayat le 22 mars 2012 : [