Aucun groupe politique n’est plus conscient de la portee historique de
l’acceptation par le cabinet de la feuille de route et du discours sur
l' »occupation » d’Ariel Sharon que le conseil de Yesha, qui represente les
colons de Cisjordanie et de la Bande de Gaza.

Il compte lancer une campagne de protestation, qui consistera en une
manifestation de masse mercredi prochain, ainsi qu’en plusieurs
manifestations sur les routes et aux carrefours ces prochaines semaines,
pour bloquer le processus politique et soumettre le gouvernement.

Jeudi, ses dirigeants se sont reunis a huis clos, pour dessiner une feuille
de route de leur cru afin d’empecher l’application de la feuille de route.

« Ce qui est fait est fait », dit Yehoshoua Mor-Yosef, porte-parole du groupe,
« mais ce que nous pouvons faire, c’est amender la feuille de route et la
faire glisser a droite. »
La manifestation de mercredi prochain est programmee pour coincider avec le
sommet d’Akaba, ou se rencontreront George Bush, Mahmoud Abbas et Ariel
Sharon pour discuter de l’avenir d’un Etat palestinien.

Sur la scene politique interieure, le conseil veut mettre la pression sur le
Parti National Religieux et culpabiliser au maximum les ministres du Likoud
qui se sont abstenus lors du vote du cabinet.

Selon Yehoshoua Mor-Yosef, pour torpiller la feuille de route, dont des
membres du conseil affirment qu’elle est « en totale contradiction avec le
reve du retour a Sion », le consil reclame egalement un debat a la Knesset et
un vote du cabinet sur chacune des clauses de l’accord.

Au milieu des annees 90, les colons avaient organise de nombreuses
manifestations, parfois violentes, le long des principaux axes routiers et
aux principaux carrefours, pour protester contre les accords d’Oslo.

Ce nouveau sentiment d’urgence tient a la popularite de Sharon et a la
legitimite du vote du cabient.
« Cette fois, c’est different », dit David Wilder, un des leaders de la
communaute juive de Hebron. « A Camp David, nous avions un premier ministre
(Ehoud Barak) qui operait en solitaire, sans soutien du gouvernement.
Aujourd’hui, il s’agit d’une decision du gouvernement, ou un groupe de 24
ministres a pris une decision contraignante, acceptant un Etat palestinien
et toutes les implications qui en decoulent. »

Daniella Weiss, chef du conseil local de Kedoumim, dit qu’elle a commence a
preparer la campagne de masse des que la nouvelle sur l’acceptation de la
feuille de route par le cabinet a ete connue.
En quelques heures, des militants ont ete reunis, par telephone et par fax,
et ont commence a planifier une serie de conferences pour diffuser
l’information sur les manifestations a venir.

En dehors de la mobilisation pour la manifestation, dont Daniella Weiss
pense qu’elle depassera les 100.000, les militants ont entame des
preparatifs pour concevoir une infrastructure destinee a empecher le
demantelement de toute colonie, si petite ou isolee soit-elle.

« Nous protegerons chaque colonie et chaque avant-poste, comme un homme
defend sa maison et sa patrie », peut-on lire sur un tract distribue par le
conseil local.

Des blocages de routes et de carrefours suivront.

Le mouvement des colons se sent assiege, non seulement par le Quartet et la
feuille de route,mais aussi par la decision du gouvernement de poursuivre et
meme d’etendre la construction de la cloture de securite a l’ouest de la
Ligne Verte.
« Nous empecherons tout effort destine a isoler des colonies, et empecherons
de nos corps toute action dont c’est l’objectif », peut-on encore lire sur ce
meme tract.

Le sentiment de trahison vis-a-vis de Sharon, leur ex-idole, est si fort que
certains colons l’appellent maintenant « apikoros », terme employe pour
qualifier ceux qui, peu avant la destruction du second Temple, se sont
assimiles a la culture hellene et ceux qui ont souhaite la destruction des
Juifs.

De son cote, Shalom Akhshav (La Paix Maintenant) organise une manifestation
samedi soir devant la residence du Premier ministre a Jerusalem, et compte
diffuser en boucle le discours de Sharon sur l' »occupation », pour le forcer
a « traduire ses paroles en actes ».

Yariv Oppenheimer, porte-parole de ShalomAkhshav, voit dans la resurgence de
la droite une possibilite de reveiller les militants de Shalom Akhshav. « Ce
n’est un secret pour personne que notre nombre a chute ces derniers mois,
mais le reveil de la droite pourrait provoquer le reveil de la gauche. »