Récit de Mary Schweitzer (militante de Shalom Akhshav)

5 juin 2002

Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant


Aujourd’hui à Oranit

Mes amis,

Les terribles événements d’aujourd’hui, les meurtres et les images du bus totalement réduit en cendres au carrefour Um-al-Faham/Megiddo, ainsi que les photos des tanks de Tsahal patrouillant à Jénine, sont encore un exemple du besoin désespéré qui est le nôtre de nous reprendre et de trouver une fin à ce conflit.

Alors, qu’y a-t-il eu de changé dans la cérémonie qui nous avions prévue aujourd’hui? Les ballons de couleurs, qui devaient marquer la frontière entre Israël et la Palestine (avec les 5 couleurs des deux drapeaux nationaux) n’ont pas servi : seuls des ballons noirs ont été attachés aux arbres plantés. Encore un symbole du chagrin que tous, Israéliens comme Palestiniens, ressentent à la perte de leurs êtres chers, après 35 ans
d’occupation, et tout particulièrement pendant ces 20 derniers mois sanglants.

Après une minute de silence en leur mémoire, nous avons planté des oliviers, symboles de paix pour tous les peuples. Mais les cris des colons d’Oranit, tout près de là, nous harcelaient. Ils criaient : « le Hamas recrute, signez maintenant ». Sans commentaire.

Nous avons planté les arbres. Nous avons appelé à la fin de l’occupation. Shalom Harari, vétéran de la guerre de 67, et handicapé, a lu un poème. Tout au long de la cérémonie, même pendant la minute de silence en mémoire des victimes, les colons nous ont provoqués : nos enfants devraient exploser dans des bus, nos proches devraient mourir dans des restaurants, nos fils devraient s’en retourner chez eux dans des cercueils.

Nous avons planté les arbres. Nous nous sommes dirigés vers nos voitures et nos cars devant nous ramener en Israël. Mais, avant que nous n’ayons même eu le temps d’y monter, les colons s’étaient précipités sur les 35 pousses d’oliviers, symboles d’espoir, de paix entre les peuples, d’une frontière entre Israël et la Palestine. Avec une colère mêlée de jubilation, Ils arrachèrent les pousses. Le plus curieux est qu’ils les emportèrent chez eux !

Assawi, un militant de Kafr Kassem, invita les militants à revenir, encore et
encore, le temps qu’il faudra, pour que ce lieu devienne une forêt de paix,
une oliveraie où les futures generations d’Israéliens et de Palestiniens
pourront jouer, apprendre à partager, et même, oui, à s’aimer. Ces 35 arbres
seront replantés dans des crèches, dans des villages d’Israël, en signe
d’espoir, et si Dieu le veut, l’oliveraie d’Assawi grandira, elle aussi. Nous
reviendrons planter et nourrir l’espoir d’une paix juste et durable pour ces
peuples qui la désirent tant. Et au bout, quel que soit le temps que cela
prendra, nous gagnerons : nous viendrons à bout de la peur, de la colère et
de la haine. Nous apprendrons à vivre ensemble dans le respect et la
tolérance mutuels, et dans la sécurité.

Car, après tout, quel autre choix avons-nous?

Mary