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Yediot Aharonot, 19 juillet 2006

Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant


Lorsqu’une seule roquette Qassam est tombée sur le terrain d’une école d’Ashkelon, fermée pour les vacances, et a quelque peu endommagé le bâtiment, le premier ministre Olmert a parlé de « déclaration de guerre ». On peut se demander si sa langue a fourché ou s’il avait bien pesé ses mots.

Depuis lors, il a reçu une piqûre de rappel. Vous pensez que ça, c’est la guerre ? On va vous montrer ce qu’est la guerre !

Les analystes qui cherchent le moyen de s’en sortir doivent se souvenir de l’exigence initiale des milices palestiniennes : libérer les femmes et les mineurs détenus en Israël en échange de Gilad Shalit. Dans notre hâte de ne pas négocier avec les terroristes (et peu importe si nous l’avons déjà fait et si nous finirons inévitablement par le faire), personne ne s’est soucié de se demander pourquoi des centaines de femmes et de mineurs palestiniens croupissaient dans les prisons israéliennes.

Ceux qui ne parviennent pas à comprendre pourquoi les Palestiniens n’ont pas renoncé à la lutte après le retrait d’Israël de Gaza seraient surpris d’apprendre qu’ils ne partagent pas la distinction faite par Israël entre Gaza et la Cisjordanie, et qu’on leur rappelle tous les jours que la démolition du Goush Katif (groupe de colonies dans la bande de Gaza) n’a pas fait d’eux un peuple libre sur sa terre.

Lundi, l’officier israélien responsable de la Cisjordanie, a dit que les organisations terroristes en Cisjordanie tentent d’ouvrir un autre front. Faux ! Pour les Palestiniens, il s’agit du même front.

Toujours plus de force

En novembre 2000, Ariel Sharon, alors leader de l’opposition, s’adressait à une foule de 100.000 personnes réunies à Jérusalem sous le slogan : « Laissez Tsahal gagner ». Tsahal n’a pas mis en œuvre la totalité de son potentiel face à l’Intifada, disait Sharon à la foule, et sa promesse d’en finir avec une politique de retenue militaire l’a aidé à gagner les élections quelques mois plus tard.

Presque six ans plus tard, alors qu’aucune fin des affrontements ne se profile à l’horizon, Olmert tente toujours de vendre l’idée qu’il existe un potentiel de force non encore exploité qui, libéré, donnerait ce qu’appelle le premier ministre « le coup gagnant ».

Davantage de force, nous dit-il, réussira là où la simple force a échoué. Il nous faut restaurer le pouvoir de dissuasion d’Israël, dit-il, comme si la supériorité militaire d’Israël était mise en doute, et comme si elle avait empêché les pierres de la première Intifada d’évoluer en roquettes et en ceintures d’explosifs.

Guerre psychologique

Que Hasan Nasrallah ait donné l’ordre d’attaquer la frontière nord d’Israël et capturer des soldats israéliens pour venir en aide aux Palestiniens, ou libérer Sami Kuntar [[Sami Kuntar est le prisonnier libanais le plus ancien détenu en Israël (depuis 1979). Il a été l’auteur d’un attentat qui a tué 3 membres d’une même famille israélienne.]] après ses presque 30 ans de captivité, ou « libérer » les Fermes de Chebaa, ou tout simplement porter un coup à l’ennemi sioniste, Israël avait tout à fait le droit de réagir.

Mais en même temps, il vaut mieux être intelligent qu’avoir raison, et le gouvernement n’a rien dit d’intelligent depuis le premier jour. Il procède de façon militante, comme il l’a fait sur le front diplomatique avant l’éclatement de ce dernier conflit : sans vision d’ensemble.

Olmert et Peretz (ministre de la défense) louent inlassablement la résilience de l’opinion. Le message, pas si subliminal que cela, étant qu’une voix d’opposition ferait le jeu de l’ennemi. Cette glorification du consensus et cette dé-légitimation de la protestation politique ou populaire constitue une menace contre Israël bien plus grande que les missiles tirés depuis le nord.

En faisant de notre capacité à souffrir en silence un test de loyauté et de bravoure, le gouvernement mène une guerre psychologique contre ses propres citoyens. Un récent sondage, qui indique que plus de 80% de l’opinion soutient la continuation des actions militaires, pourrait donner l’impression que cette approche marche, mais son succès se révélera de courte durée. La tolérance de l’opinion israélienne à l’égard des victimes civiles et militaires est limitée. Cela est à porter à notre crédit. Ce n’est pas un signe de faiblesse, mais d’humanité.

Finissez-en maintenant !

Hier, Olmert a dit à la nation qu’il faisait tout son possible pour ramener les soldats capturés sains et saufs à la maison, mais après une rencontre aujourd’hui avec une délégation des Nations Unies, sa ministre des affaires étrangères s’est dépêchée d’écarter toute idée d’ouverture d’un front diplomatique qui ferait cesser les opérations militaires. Apparemment, le gouvernement est disposé à tout faire… sauf à cesser le feu.

Le chef d’état-major lui-même a dit qu’au bout du compte, ce n’était pas à l’armée mais aux politiques de finir le travail. La question est : quand ? Avec plusieurs centaines de Palestiniens et de Libanais tués, dont de nombreux civils, en à peine quelques semaines, on pourrait dire que nous avons déjà prouvé que nous savions faire la guerre. Maintenant, au nom de leurs enfants et des nôtres, il est temps de montrer que nous savons aussi la terminer.