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Ha’aretz, 23 janvier 2006

Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant


Maintenant qu’a pris fin la lutte entre les jeune et vielle garde du Fatah pour la composition de la liste du parti aux élections législatives palestiniennes, la campagne se caractérise par un débat idéologique et politique plutôt que par des attaques personnelles. Ici et là, des représentants du Fatah et du Hamas tentent bien de se jeter un peu de boue à la figure, mais dans l’ensemble, les attaques personnelles ne sont plus directes et le débat tourne autour de questions comme le style de gouvernance et la politique de l’Autorité palestinienne (AP).

Les représentants du Fatah répondent aux critiques faites à l’AP (corruption, échec d’Oslo et donc inexistence de fait de l’Autorité [[rappelons que la création de l’Autorité palestinienne est le résultat direct des Accords d’Oslo]]) de plusieurs manières. L’une d’entre elles consiste à contrôler l’économie des élections. Ces derniers mois, les services de sécurité palestiniens (en particulier à Gaza) ont recruté des milliers de jeunes, qui ont commencé à toucher les maigres salaires que paye en général l’Autorité palestinienne. Les choses en sont arrivées à un tel point que, ces derniers jours, la presse palestinienne rapporte qu’une grave crise financière attend l’AP au lendemain des élections. On peut donc dire que si tout se passe comme prévu et si les élections ont bien lieu mercredi, personne ne sera surpris si le Trésor palestinien se trouve dans l’incapacité de payer les salaires de janvier.

Le Fatah avertit qu’au cas où le Hamas l’emporterait, des Etats comme les Etats-Unis ou les pays européens arrêteraient leur aide financière donnée à l’AP. Mais le leader du Hamas Ismail Haniya réplique qu’il n’y a aucun souci à se faire : « l’AP a assez d’argent, et nous disposons de ressources en gaz inexploitées sur la côte de Gaza« . Lui et ses collègues affirment avoir discuté de la question avec des pays européens et qu’il n’y a pas d’inquiétude à avoir, l’aide ne sera pas stoppée. Quant aux Etats-Unis, Haniya déclare : « le Venezuela et d’autres pays d’Amérique du Sud n’ont pas peur des Etats-Unis ; pourquoi devrions-nous en avoir peur? »

Concernant le débat politique, Mohammed Dahlan a tourné en ridicule les représentants du Hamas en disant : « ah bon? Oslo a échoué? Alors, comment se fait-il que vous participiez à ces élections? » Car, sans le processus d’Oslo, il n’y aurait pas d’AP, et donc pas d’élections. Mahmoud Abbas et ses porte-parole tentent de convaincre l’opinion que le processus d’Oslo a apporté d’importants avantages aux Palestiniens, et qu’il a un avenir. Ils le font, par exemple, en utilisant des extraits de déclarations d’Ehud Olmert, « qui espère entamer des négociations sur un règlement définitif immédiatement après les élections en Palestine et en Israël ». Cette phrase a fait la une du quotidien à grand tirage Al-Quds de mercredi dernier, qui présentait les déclarations d’Olmert comme une réponse à celles d’Abbas. Selon l’article, Olmert dit à demi-mot que les Palestiniens de Jérusalem ne demeureront pas éternellement sous la coupe d’Israël, ce qui signifie qu’il est prêt, à l’avenir, à diviser la capitale d’Israël. De plus, les médias palestiniens, favorables au Fatah, font grand cas de tout sondage qui montre que la plupart des Israéliens désirent davantage d’évacuations en Cisjordanie et qu’ils sont prêts à des concessions sur Jérusalem.

Par ailleurs, les représentants du Fatah tentent de faire peur à l’électeur palestinien en affirmant que le Hamas est un mouvement islamiste extrémiste qui voudra imposer à la société palestinienne un style de vie et des règles religieuses dont elle ne veut pas. Ils disent également que le Hamas « est opposé à toute négociation et cherche à renforcer sa branche armée, les Brigades Al-Qassam ».

Si l’on en croit les sondages, la majorité penche toujours pour le Fatah. Mais même si celui-ci l’emporte par une très petite marge, il est clair que parmi les députés élus se trouveront un grand nombre de candidats qui se seront définis comme indépendants. Certains de ces indépendants seront des partisans du Hamas, mais ils n’auront aucune difficulté pour rejoindre une coalition dirigée par le Fatah.

Il semble que, pour le Hamas, cela constituera une situation confortable : ses représentants seront bien dans l’opposition, mais quelques-uns d’entre eux seront quand même dans la coalition. Ainsi, il pourra réfléchir, avec prudence, à la meilleure manière de poursuivre sur sa voie.