Peace Now, Ir Amim et l’Association pour la justice environnementale en Israël déposent conjointement une objection auprès du Conseil supérieur de planification de l’administration civile contre les plans de construction de quelque 3500 unités de logement sur l’E1. Les organisations ont parallèlement lancé une campagne (avec l’ONG Mechazkim) pour appeler le public à signer l’opposition, qui a déjà été signée par plus de 1 500 opposants en quelques jours. 


Traduction : Bernard Bohbot pour LPM

Auteurs : Communiqué de presse commun de Peace Now et Ir Amim, 19 août 2020

Illustration : Séparation de la zone E1’s de la partie urbaine de Jérusalem-Ouest (en bleu),  et son rôle central pour la zone urbaine palestinienne (en orange)

https://peacenow.org.il/en/objection-to-building-a-new-settlement-in-e1

Mis en ligne le 30 août 2020


À la veille des dernières élections, le Premier ministre Netanyahu a ordonné l’avancement des plans de construction dans la zone E1, à la suite de quoi les plans n° 420/4/7 et 420/4/10 pour la construction de 3 412 unités de logement ont été publiés pour dépôt, dans une zone située à l’est de Jérusalem Est, en plein cœur de la Cisjordanie. Les éventuels opposants à ce projet ont eu jusqu’au 28 août 2020 pour présenter leurs objections.

La construction dans la zone E1 est considérée comme essentiellement fatale à la perspective d’une solution à deux Etats car elle divise la Cisjordanie en deux – une région Nord et une région Sud – et empêche le développement de la métropole centrale Ramallah-Jérusalem-Est-Bethléem en Cisjordanie. Même du point de vue du développement et de la planification israéliens, une colonie de peuplement dans l’E1 ferait plus de mal que de bien et pourrait conduire à l’affaiblissement de Jérusalem sur le plan économique et social.

https://www.youtube.com/watch?v=cnyL6mGcQug&feature=youtu.be

Les principaux arguments de cette objection :

(Celle-ci a été préparée par l’architecte Uri Reicher, spécialisé dans l’aménagement du territoire, et en particulier dans l’aménagement palestinien en Cisjordanie.)

A. La zone E1 est essentielle au développement des Palestiniens (tout autant que la métropole de Tel-Aviv l’est au développement d’Israël), de sorte que la construction israélienne dans la zone E1 pourrait détruire les chances de paix.
La construction dans la zone E1 portera gravement atteinte à la capacité de développement d’un État palestinien ou de tout espace palestinien indépendant. La zone E1 est la seule réserve foncière de la région métropolitaine de Bethléem-Jérusalem-Ramallah, qui permet le développement d’une métropole urbaine essentielle à la croissance économique et au développement de la métropole.
Sans la zone E1, aucun État palestinien viable ne peut être créé, avec un potentiel de développement économique et social avec Jérusalem-Est pour capitale. Ce sont là des conditions nécessaires pour parvenir à la paix et à une solution à deux États. C’est pourquoi la colonisation dans la zone E1 est considérée comme mortelle en termes de perspective de paix.

B. Une colonie dans la zone E1 nuirait au potentiel de développement de Jérusalem-Est. Jérusalem-Est est la plus grande ville palestinienne de Cisjordanie. Environ 450 000 Palestiniens vivent à Jérusalem et dans les quartiers adjacents (tels que Abu Dis, Anata et autres). La zone E1 est la seule réserve foncière substantielle dans la région de Jérusalem-Est digne de ce nom et de qualité suffisante pour assurer le développement de la ville. La zone E1 est indispensable pour assurer une continuité urbaine de qualité et le développement économique et social de Jérusalem-Est. La colonisation israélienne dans la partie E1 va couper Jérusalem-Est de l’espace palestinien, provoquer la mort de la ville et la transformer en une périphérie au cœur du territoire palestinien.

C. Une implantation dans la zone E1 nuirait au potentiel de développement et à la centralité de la métropole de Ramallah-Jérusalem-Est-Bethléem. La zone E1 est importante non seulement mais pour toute cette région métropolitaine. Celle-ci joue en effet le rôle de métropole économique, publique et culturelle au centre de la Cisjordanie aussi bien que centre historique, gouvernemental et touristique. Elle est aussi l’une des dernières réserves foncières situées au coeur de la région métropolitaine de sorte que son développement potentiel est de loin le plus essentiel, en termes de distance par rapport aux lieux de travail, sa capacité à desservir un grand nombre de cités voisines, entre autres exemples.

D. Une implantation dans l’E1 nuirait au potentiel de développement au niveau régional de toute la Cisjordanie. Non seulement la métropole de Ramallah-Jérusalem-Est-Bethléem se trouve à proximité de la zone E1 (distance raisonnable pour faire le va-et-viens entre le travail et la maison), mais aussi d’autres villes comme Jéricho à l’est et Biddu à l’ouest. La zone E1 est située au cœur de la longue bande de terres entre Jénine et Hébron le long de l’autoroute 60 en Cisjordanie. Cette bande de terre est la principale zone de développement au niveau régional (le développement d’autres réserves foncières, comme dans la vallée du Jourdain, ne sont pas de qualité comparable à celui de la bande centrale). La zone E1 se trouve également sur la route Jérusalem-Jéricho, à un carrefour d’une importance régionale cruciale, et constitue une plaque tournante régionale potentielle reliant Jéricho (et éventuellement la Jordanie), au nord et au sud de la Cisjordanie, à proximité des routes principales. Une telle zone peut être utilisée pour des usages régionaux uniques qui ne sont pas possibles ailleurs – comme un quartier d’affaires central, un centre de transport principal, un stade national, des institutions gouvernementales et des espaces ouverts mixtes où se trouvent logements et emplois.

E. La construction israélienne dans la zone E1 constituera une discrimination flagrante et portera atteinte au droit à l’égalité. Au cours des 53 années de domination israélienne en Cisjordanie, une politique de discrimination flagrante a été adoptée dans tout ce qui concerne l’attribution des terres, la planification et la construction. Par exemple, alors qu’Israël a établi plus de 130 colonies officielles, des dizaines de zones industrielles, de carrières, de sites touristiques et plus encore, pas une seule colonie n’a été établie par Israël pour la population palestinienne. Sur les centaines de milliers de dounams de terres d’État allouées à divers usages en Cisjordanie, 99,8 % ont été alloués à l’usage des Israéliens et seulement 0,2 % aux Palestiniens. Dans son arrêt sur la loi d’expropriation (loi de régulation) de juin 2020, la Haute Cour israélienne a jugé que cette discrimination est illégale et que les Palestiniens ont droit à l’égalité. La construction en zone E1 pour les Israéliens constituerait une discrimination et, en ce sens, une violation du droit international.

F. En termes de développement israélien, E1 est géographiquement détaché de toute localité israélienne. La zone E1 est reliée à Jérusalem-Ouest et à Ma’ale Adumim par une route interurbaine, sans possibilité de développement intégral. En fait, il s’agit d’une autre banlieue de Jérusalem coupée de la ville qui peut être construite tout autant que n’importe où ailleurs autour de Jérusalem.

G. Une implantation dans la zone E1 affaiblirait Jérusalem et ses commerçants – comme dans d’autres banlieues, il se forme un « beignet » dont le centre ville est la partie la plus faible. Les principes de développement énoncés dans le Cabinet du Premier ministre en tant que politique nationale parlent de la concentration du développement de Jérusalem dans la ville elle-même, dans la rénovation urbaine et dans le renforcement du centre plutôt que dans les banlieues.

Texte intégral en anglais : http://peacenow.org.il/wp-content/uploads/2020/08/E1_Objection_Eng.pdf

Pour plus d’informations : Brian Reeves +972-54-709-5882