Huwara refait la une de l’actualité sécuritaire israélienne. Non par l’annonce de l’arrestation de ceux qui ont causé la mort d’un Palestinien après la « ratonnade » qui a suivi le meurtre, le 26 février dernier, des deux frère israéliens – Hillel et Yagel Yaniv – alors que leurs meurtriers ont très rapidement été mis hors d’état de nuire. Le nouvel attentat de ce dimanche, au cours duquel deux Israéliens ont été sérieusement blessés, illustre bien que les seules répression et élimination des auteurs ne sauraient mettre un terme aux attentats et aux pertes humaines qui endeuillent Israéliens et Palestiniens. Se limiter à la gestion du conflit israélo-palestinien sans faire progresser une solution politique peut permettre la survenue d’accalmies, ce qui est certes important, mais non pas l’éradication de la violence. 

Cet attentat confirme également à quel point les extrêmes se rejoignent et « font le jeu » de leurs adversaires qui font parfois office de partenaires. Quoi de plus efficace qu’un odieux attentat « pour faire oublier » les exactions commises par des résidents d’implantations – le fait qu’elles soient en représailles n’excuse rien -, ainsi que le manque de résultats des forces de sécurité israéliennes, et les déclarations abominables d’un Smotrich (certes contraint de les atténuer quelque peu mais qui n’en pense pas moins…) ?

D’ailleurs, lorsque cet individu a été interrogé dimanche soir sur ses déclarations antérieures, lors de son passage « à la dérobade » à Paris, après le camouflet réconfortant qui lui a été infligé à Washington, il a rétorqué : « J’espérais que vous ne poseriez pas cette question mais me parleriez de l’attentat qui vient d’être perpétré à Huwara. » Il n’est pas allé jusqu’à remercier ceux qui avaient commandité cette attaque meurtrière qui tombait on ne peut mieux pour lui. Il a en outre profité de cette brève escapade pour ânonner à nouveau les antiennes de la droite extrême sur l’inexistence des Palestiniens et du peuple palestinien. Ce n’est donc pas avec les Palestiniens que négociait à Sharm el Sheikh le gouvernement israélien quelques heures avant que Smotrich ne tienne ces propos hors sol.

Il faut saluer le pragmatisme du gouvernement qui a accepté de geler les nouvelles constructions dans les implantations pendant quatre mois ainsi que la légalisation des avant-postes illégaux de Cisjordanie pendant six mois. Non, il ne s’agit pas du gouvernement de Bennett-Lapid mais bien de celui de Netanyahu-Smotrich-Ben Gvir. Ce qui était vilipendé hier est endossé aujourd’hui, ce qui tend à prouver que ce qui avait été fait antérieurement n’était pas aussi irresponsable que le prétendait l’opposition d’alors.

Quoi qu’il en soit, l’incertitude sécuritaire à la veille du Ramadan qui débute ce mercredi ne freine en rien la frénésie législative de la coalition qu’accentuent l’approche des fêtes de Pessah et la fin de la session parlementaire d’hiver, le 2 avril prochain. Elle veut auparavant faire passer la loi, sans doute l’une des plus importantes de sa révolution judiciaire, afférente à la Commission de nominations des juges. Un assouplissement unilatéral a été proposé le 19 mars par la coalition après qu’elle s’est empressée de rejeter le compromis proposé par le Président de l’État. A ce stade, il nous semble prématuré d’entrer dans les détails d’une modification éventuelle qui n’est pas encore stabilisée et qui au final n’atténue pas, ou à la marge, le changement voulu qui va conduire à la politisation de la nomination des juges et nuire à l’indépendance du pouvoir judiciaire et à sa capacité à critiquer les décisions de la Knesset et du gouvernement. La mesure portera atteinte au principe de séparation des pouvoirs et ouvrira la voie à l’élection de juges davantage en raison de leur proximité avec les membres de la coalition que pour leur professionnalisme.

Le gouvernement veut pouvoir nommer au plus vite à la Cour suprême deux juges qui lui sont proches suite au départ en retraite en octobre de la présidente actuelle Esther Hayut et d’Anat Baron, toutes deux considérées comme libérales. La majorité dont disposera la coalition au sein de la Commission de nomination lui permettra de contourner la pratique de l’ancienneté dans la désignation du président de la Cour suprême et d’y nommer,  parmi les juges en exercice, un président proche des positions et orientations de l’exécutif en place. Il convient de savoir que le nouveau président de la Cour suprême sera également celui qui déterminera le panel des juges qui auront à traiter l’appel du Premier ministre, dans la mesure où il est déposé, s’il est condamné par le tribunal de district.

Tout est dans tout et réciproquement…
Un Israël illibéral, état bananier promouvant des lois personnelles privilégiant les politiques et leurs copains, n’est pas, n’est plus l’Israël que nous connaissions. Les Mouvements de jeunesse juifs sionistes ont conclu leur récent communiqué sur la situation en Israël par cette citation d’Elie Wiesel lors de la remise de son Prix Nobel de la paix en 1986 : « Nous devons toujours prendre parti. La neutralité aide l’oppresseur,  jamais la victime. Le silence encourage le persécuteur,  jamais le persécuté. »

C’est pourquoi nous avons fait le choix de prendre parti. Avec JCall et le CCLJ, La Paix Maintenant co-organise la rencontre de Bruxelles « Sauver la démocratie israélienne », le 27 mars prochain. Nous espérons que vous serez nombreux  à suivre en visioconférence cette rencontre au cours de laquelle interviendront des personnalités dont la qualité et la solidarité avec Israël ne sauraient être mises en doute. (cf. rubrique agenda)