Il ne s’agit certes pas d’une chronique météo. C’est bien de politique qu’il sera ici question. Les modalités de l’éviction de Moshe Ya’alon du ministère de la Défense et la nomination d’Avigdor Lieberman ne présageaient rien de bon – pour Israël en premier lieu. En s’appuyant sur “l’ouverture” lexicale de Nétanyahou à propos de l’initiative arabe (de 2002… il était temps!) et sur sa reconnaissance soudaine des aspects positifs qu’elle recelait, on pouvait essayer de se convaincre que le pire n’est jamais assuré…

On pouvait même voir un début de confirmation de cet optimisme quelque peu volontariste dans l’accord par le nouveau ministre de laisser démolir une structure illégale dans le colonie de Guivat Gal, près de ‘Hébron. Les affrontements qui se sont produits entre soldats et colons à cette occasion, le 13 juin, n’ont pas fait plier Lieberman – lequel, on le sait, vit lui-même dans une implantation de Cisjordanie; il avait pourtant, dans un passé récent, critiqué avec virulence ce type de démolition. Hélas, il a fallu déchanter rapidement.

L’initiative arabe ne constitue plus une base de discussion. Oubliés, les aspects positifs! Le gouvernement israélien déclare ne pas poser de conditions préalables, mais voudrait pour juger ces propositions pertinentes en voir supprimer certains éléments: retrait des Territoires, retour des réfugiés… Ces questions ne devraient-elles pas, au contraire, faire l’objet de discussions?

• Qu’en est-il de l’initiative française? «Never!» dixit Israël, qui devient ainsi le symbole d’un refus se substituant dans les mémoires au refus arabe – les «trois “non” de Khartoum» de septembre 1967.

L’annulation de permis d’entrée en Israël signifiée par Lieberman à Muhammad Al-Madani, chef du comité pour l’interaction avec la société israélienne, ne vient rien arranger. Il est vrai qu’un homme ouvert au dialogue est dangereux, surtout lorsqu’on répète du soir au matin qu’on n’a pas d’interlocuteur. Nul doute qu’une mesure de ce type puisse sensiblement améliorer la sécurité des Israéliens, à Tel-Aviv, Jérusalem ou en Cisjordanie!

• Cerise sur le gâteau… le projet de loi sur les ONG pour les droits civiques que le gouvernement israélien entend faire adopter définitivement dans les semaines prochaines. Cette loi, dite “de transparence”, et qui est en fait celle de l’opacité sur le financement des organisations favorables à la colonisation, vise à délégitimer comme agents de l’étranger les associations de défense des droits de l’Homme en Israël et dans les territoires palestiniens occupés – telles B’Tselem (qui documente des violations des droits humains dans les territoires occupés), Shovrim Shtiqa / Brisons-le-Silence (qui recueille les témoignages de soldats israéliens), et bien d’autres encore…

Cette loi obligerait en effet toute association recevant plus de 50 % de son financement de l’étranger à en faire état sur l’ensemble de ses documents. Sur 27 ONG susceptibles d’être atteintes, 25 sont “de gauche”… Éloquent! Le plus souvent, l’étranger dont il est question est ami d’Israël. Il s’agit essentiellement de pays d’Europe et de l’Union européenne. Lorsque ces pays apportent un financement à une institution culturelle ou de recherche, le gouvernement s’en réjouit et les ministres se bousculent au cocktail d’inauguration Mais lorsque le financement concerne une ONG de la société civile, cela devient une ingérence et les militants associatifs ne sont plus que des agents doubles ou des taupes.

Il importe que les gouvernements étrangers et plus largement tous ceux pour lesquels Israël compte, fassent connaître leur opposition à ce qui n’est encore qu’un projet – à même d’altérer la nature démocratique du pays.

Et pourtant

Dans un tel contexte, qui n’incite guère à l’optimisme, on notera cependant l’ouverture de la semaine du livre hébreu. Du 15 au 25 juin le pays se transformera en une immense librairie, des dizaines d’événements culturels se dérouleront un peu partout. Espérer en un pays où le livre jouit d’un tel statut, est-ce de l’optimisme inconsidéré ou de la confiance en l’avenir?