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Common Ground News Service (CGNews), 12 janvier 2006

Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant


Les événements dramatiques qui se déroulent quotidiennement rendent
extrêmement difficile une quelconque prédiction concernant le bon remède à
apporter pour résoudre le conflit israélo-palestinien ou pour à tout le
moins concevoir un traitement réaliste qui rapprocherait son terme. Les mois
à venir seront cruciaux. Des lignes y seront tracées qui définiront les
futures relations entre les deux côtés.

Du côté palestinien, la situation est toujours incertaine, et l’on ne sait
toujours pas si les élections auront lieu à la date prévue ou si elles
seront reportées. En cas de report, ce retard provoquera-t-il une nouvelle
vague de violences? Les élections ouvriront-elles une page nouvelle dans
l’histoire palestinienne qui entraînera des changements positifs, ce qui
permettrait à Mahmoud Abbas de finir par résoudre le chaos endémique et
affirmer son autorité? Si le Hamas gagne les élections, assisterons-nous à
la naissance d’une nouvelle théocratie dans la région, menée par des
fanatiques? Ou bien l’Autorité palestinienne annulera-t-elle les résultats
pour imposer un coup d’Etat, comme en Algérie, qui conduirait alors à une
longue vendetta entre le Hamas et l’Autorité palestinienne ?

Dans une situation où l’Autorité palestinienne perd tout contrôle et où les
milices font la loi dans la rue, les milices du Fatah continueront à
déstabiliser la société en se présentant comme les « sauveurs de la nation « ,
alors qu’en fait, ils en sont plutôt le talon d’Achille. Même aujourd’hui,
Mahmoud Abbas se retrouve en situation difficile, car il affronte de
nombreux ennemis qui, chacun, travaille à ses propres intérêts et selon un
agenda qui lui est propre. L’agenda national, quant à lui, a été oublié, et
même le Fatah est fragmenté à un point tel qu’il est devenu méconnaissable.
Il est devenu clair, avant même les élections, que le Fatah a perdu son
monopole et ne contrôle plus grand-chose. Et l’opinion semble en avoir assez
du Fatah, ce qui ouvre la voie à une victoire du Hamas, à une majorité
écrasante !

En Israël, la situation n’est pas moins confuse. Avec le nouveau parti
Kadima et la maladie d’Ariel Sharon, les cartes sont redistribuées. Qui va
remplacer Sharon au poste de Premier ministre? Sur quel programme concernant
le processus de paix? Le nouveau Premier ministre élu continuera-t-il dans
la voie de l’unilatéralisme tracée par Sharon? Cet unilatéralisme a valu au
Premier ministre Sharon un immense soutien populaire. Le prochain
gouvernement israélien maintiendra-t-il cette dynamique? Si le Likoud,
emmené par Netanyahou, revient sur le devant de la scène, quelle sera sa
politique? Quelle sera la vision de la paix de Netanyahou? Et si Peretz et
le Parti travailliste en ont l’occasion, Peretz créera-t-il une dynamique
qui permettra de faire avancer le processus de paix avec les Palestiniens?

En Israël comme en Palestine, le paysage politique est plus difficile et
complexe que jamais. Il semble que nous soyons en train d’entrer dans une
sorte de vide politique, avec, pendant longtemps, très peu de chances de
faire avancer le processus de paix. Ce vide n’est pas dû à l’absence de
programme, mais à l’absence de l’homme qui fixe les règles du jeu (Sharon).

Quel que soit le nouveau Premier ministre israélien, il lui sera difficile
de terminer ce que Sharon a commencé. Quel autre dirigeant israélien aura la
force, la détermination et le soutien populaire nécessaires pour continuer à
démanteler les colonies et en finir avec l’occupation? Au cas où cela ne se
produirait pas, nous connaîtrions alors un avenir sans solution, et la
perpétuation du conflit produirait des effets très négatifs des deux côtés.

Compte tenu de la gravité de ces développements possibles, il est utile de
commencer dès à présent à s’interroger sur les futures relations
israélo-palestiniennes. Y aura-t-il un pont sur les eaux troubles? Le
principe de deux Etats est le seul qui permette aux deux nations de réaliser
leurs aspirations nationales. La feuille de route qui mène vers les deux
Etats, ainsi que ses paramètres, sont bien connus de tous. Il semble qu’il y
ait un consensus général au sein des deux peuples pour reconnaître la
nécessité d’une solution pacifique qui mettrait un terme à ce conflit
sanglant et aux massacres réciproques. Pourtant, le chemin pour y arriver
est encore très éloigné.

Il n’existe qu’une manière pour parvenir à une solution quelle qu’elle soit
: par la négociation. La négociation est toujours la seule option valide.
Pour entamer un nouveau processus négocié, les deux côtés doivent arrêter de
prétendre qu’il n’y a pas de partenaire de l’autre côté. Il est possible de
parvenir à des accords. Et ils peuvent être appliqués progressivement, avec
un cadre et un calendrier qui auront fait l’objet d’accords. L’Etat
palestinien peut bâtir ses institutions, progressivement. Il faut geler
toute création de faits accomplis sur le terrain, car ils ne font que
détériorer la situation. La négociation doit se concentrer sur les qualités
des deux Etats et sur la meilleure manière de garantir la viabilité de
l’Etat palestinien et du processus de paix en général.

Les deux côtés doivent surmonter la méfiance qui s’est établie entre eux et
qui constitue l’obstacle principal. L’établissement de la confiance dépendra
avant tout de la volonté des deux dirigeants. Les deux côtés ont besoin de
dirigeants qui soient dignes de confiance et qui entendent tous les deux
l’appel de leur peuple qui désire mettre fin au conflit. Nous avons besoin
de dirigeants qui acceptent pour mission de construire un « Pont sur des Eaux
Troubles » [[allusion, bien sûr, à la célèbre chanson de Paul Simon, « A Bridge over
Troubled Waters »]].