Les inspecteurs venus contrôler l’application de la décision de geler la
construction en Cisjordanie se sont heurtés mardi à des manifestations et
à une forte résistance de la part des colons qui ont bloqué l’accès aux
colonies aux forces de l’ordre. Barak, qui vient de faire nommer 40
inspecteurs supplémentaires pour assurer cette mission de contrôle, a
rappelé que l’armée et l’administration civile sont prêtes à faire
respecter les décisions du gouvernement. Mercredi un des leaders qui avaient organisé ces manifestations a été arrêté par l’armée.

Netanyahu a déclaré mardi soir, pour calmer les colons, que dans 10 mois la construction reprendrait et mercredi soir Barak a annoncé la décision de construire 84 nouveaux bâtiments dans les colonies, représentant 492 unités de logement. Ces récents développements témoignent du poids du lobby des colons et de la difficulté du gouvernement à faire appliquer ses décisions.

Parallèlement le projet émis par la Suède, pays assurant en ce moment la
direction de l’UE, de reconnaître Jérusalem comme la capitale du futur
État palestinien a été vivement critiqué par le gouvernement et par la
leader de l’opposition, Tsipi Livni, qui a déclaré qu’une telle décision
invaliderait la possibilité pour les Européens de jouer un rôle
d’intermédiaire. Cette même semaine, on apprend qu’en 2008, le ministère
de l’Intérieur a révoqué le droit de résider à Jérusalem-Est à 4 577
Palestiniens, alors qu’en 40 ans, de 1967 à 2007, 8 558 Palestiniens
avaient perdu ce droit. Cette politique mise en place par Meïr Sheetrit
(Kadima), l’ancien ministre de l’Intérieur du gouvernement Olmert,
permettant de retirer ce droit à des habitants ne résidant pas sur place
depuis plus de 7 ans, a pour but d’après Hamoked, une association
israélienne de défense des droits des personnes, de maintenir une majorité
juive à Jérusalem. Meïr Sheetrit a répondu que cette action était
nécessaire et qu’elle a révélé que l’État payait depuis des années des
subventions à des gens qui ne résidaient plus à Jérusalem. Par ailleurs,
on apprend que la municipalité de Jérusalem prépare actuellement la
construction de 5 000 nouvelles unités de logement pour la population
arabe de Jérusalem, à l’est de la ville. C’est dans ce contexte qu’il faut
analyser le projet de rapport secret, rédigé par les consuls européens à
Jérusalem-Est, et rendu public pour la première fois.

Un projet de rapport secret des consuls européens à Jérusalem Est et à
Ramallah condamne la politique israélienne et préconise l’engagement de
l’Union Européenne (UE) dans le renforcement du statut de l’Autorité
Palestinienne (AP) dans cette ville. Il conseille en outre de prendre
diverses mesures pour protester contre la politique israélienne dans la
ville ainsi que des sanctions contre les individus et les groupes
impliqués dans « les activités d’implantations » à l’intérieur et autour
de la cité.

Le rapport dont Ha’aretz a obtenu une copie, est actualisé chaque année par les délégués de l’UE auprès de l’AP. Le rapport de cette année a été
complété le 23 novembre et présenté il y a quelques jours aux institutions
européennes à Bruxelles.

Étant donné la sensibilité du document, l’UE ne l’a jamais publié
auparavant. Les années précédentes Israël avait exercé d’intenses
pressions en ce sens, de peur que cette publication n’aggrave encore plus
la vision déjà négative du public européen à l’égard d’Israël.

Des hauts fonctionnaires des ministères des Affaires Étrangères ont
déclaré que le rapport de cette année « laissait une impression très dure
» à Bruxelles et aidait la Suède à promouvoir son projet de reconnaître
formellement Jérusalem-Est comme la capitale de l’Etat palestinien.

Le rapport accuse à la fois le gouvernement israélien et la mairie de
Jérusalem de travailler délibérément à modifier l’équilibre démographique
de la ville et à séparer Jérusalem-Est de la Cisjordanie. Il affirme que
ces deux autorités aident les organisations de droite, telles Ateret
Cohanim et Elad, dans leur effort pour réaliser cette « vision stratégique
» spécialement dans les quartiers situés autour du Mont du Temple. Ces
organisations achètent des maisons dans les quartiers arabes et réalisent
des « tentatives d’implanter de nouvelles colonies au cœur du quartier
musulman. »

La mairie, poursuit le rapport, exerce une discrimination à l’égard des
résidents arabes voulant obtenir des permis de construire, et dans les
domaines de la santé, de l’éducation, de l’hygiène et autres.

« Durant les dernières années, les Palestiniens ont reçu moins de 200
permis de construire par an » est-il rapporté. « En se fondant sur la
croissance de la population, il faudrait des permis pour 1 500 unités de
logements de plus par an ». Ainsi le rapport de l’EU note que le village
de Silwan n’a reçu que 20 permis de construire depuis 1967.

Bien que 35 pour cent des résidents de Jérusalem soient arabes, seul 5 à
10 % du budget de la ville sont affectés aux quartiers arabes. En
conséquence ces zones présentent un « contraste aigu » avec les «
quartiers ouest de Jérusalem et les implantations de Jérusalem-Est où
vivent des Israéliens. »

Une partie significative du rapport traite des fouilles archéologiques à
Jérusalem, spécialement de celles à côté du Mont du Temple. Ces fouilles,
accuse-t-il, se concentrent principalement sur l’histoire juive.
« L’archéologie dans ce cas est devenue un outil idéologique de lutte
nationale et religieuse menée de manière à modifier l’identité et le
caractère de la ville et à menacer d’ébranler sa stabilité » remarque le
rapport.

À propos d’un autre problème, il expose : « L’expansion des colonies a
provoqué une tendance à la violence des colons à l’égard de la population
palestinienne de Jérusalem-Est. La police israélienne a été témoin de
telles actions criminelles mais n’est pas intervenue de façon adéquate. »

La fermeture par Israël des institutions de l’Organisation de Libération
de la Palestine et de l’AP de Jérusalem est aussi soulignée avec force : «
Le sentiment général d’être abandonnés, ressenti par nombre de
jérusalémites de l’est, l’absence d’institutions palestiniennes patronnées
par l’État et par des organisations laïques ouvrent la voie à l’expansion
de l’influence des organisations religieuses islamiques ».

Les consuls européens ont proposé différentes mesures pour renforcer la
présence de l’AP dans la partie est de la ville et faire pression sur
Israël pour qu’elle cesse de léser la population arabe, parmi lesquelles :

« Assurer la présence de UE dans les cas juridiques concernant les
démolitions de maisons ou les expulsions de familles palestiniennes » ou «
lorsqu’il y a un risque de démolition ou d’expulsion de familles
palestiniennes ».

Permettre « la tenue de cérémonies, commémorations et évènements européens ou nationaux à Jérusalem-Est ».

Permettre « aux missions de UE ayant des bureaux ou résidant à Jérusalem-Est de recevoir régulièrement des officiels palestiniens à dîner avec des
visiteurs de l’UE de haut rang ».

« Éviter que les officiels de haut rang des pays membres soient
accompagnés par des agents de sécurité israéliens lors de leur visite de
la Vieille Ville ou de Jérusalem-Est ».

« Éviter de rencontrer des officiels israéliens dans leurs bureaux de
Jérusalem-Est ».

« Partager l’information sur les colons violents de Jérusalem-Est de
manière à contrôler leur droit d’entrée en Europe ».