Ha’aretz, 10 mars 2008

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Traduction : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant


Les chiffres ne mentent pas : depuis jeudi dernier, il y a une trêve
dans les combats dans la bande de Gaza. Il est tout à fait certain
qu’il s’agit d’une trêve à très court terme. Mais en même temps, il
est difficile de contester les chiffres : dans la journée du 29
février, quelque 50 roquettes ont été tirées, la plupart du temps par
des miliciens du Hamas. Au milieu de la semaine, le chiffre était
tombé à 10 à 15 roquettes par jour, tirées par des groupes plus
extrémistes, bien que, pour une grosse part, les Qassam aient été
fournies par le Hamas. Depuis vendredi, seules 1 ou 2 roquettes par
jour ont été tirées.

Y a-t-il eu un accord particulier entre Israël et le Hamas ? Il
semble que non, même si certains médias affirment le contraire. Plus
vraisemblablement, il s’agit d’une initiative du Hamas lui-même, qui
répond aux attentes des Egyptiens. Le Hamas a donné l’ordre aux
groupes de cesser leurs tirs, et cet ordre est suivi par les membres
de son aile armée, et partiellement par les autres groupes.

Cette accalmie relative pourrait permettre à l’Egypte d’accélérer ses
efforts en vue d’obtenir un accord de cessez-le-feu à long terme.
Cela rendra également difficile pour Israël de prendre l’initiative
d’une nouvelle série d’attaques contre le Hamas dans la bande de
Gaza. Ces derniers jours, il semble d’ailleurs que l’armée
israélienne y réduit ses opérations, en partie à cause du calme qui
règne de l’autre côté.

Cette trêve est très fragile, principalement à cause de la complexité
sur le terrain. Le massacre des étudiants religieux à Jérusalem
n’étant pas directement lié au Hamas, Israël a évité de mener des
représailles dans la bande de Gaza. En même temps, Israël ne perdra
pas son temps à rechercher qui sera derrière le prochain attentat
venu de la bande de Gaza, même si le Hamas n’a pas de responsabilité
directe. Et, de toute façon, la trêve n’est pas totale. Jeudi matin,
des membres du Jihad islamique ont fait sauter une bombe qui a tué un
soldat dans une jeep, près du kibboutz Ein Hashlosha.

Autre problème : le plan égyptien. Le chef des services secrets
égyptiens, le général Omar Suleiman, qui devait se rendre en Israël
et dans les territoires palestiniens pour faire avancer son plan, a
une fois de plus remis son déplacement, pour la deuxième semaine de
suite. Le Hamas exige en préalable la réouverture des passages
frontaliers, en particulier celui de Ra fah. Or, il est très
difficile de parvenir à un accord sur cette question qui soit
acceptable à la fois par le Hamas et par Israël. Ces derniers mois,
une idée avait été émise selon laquelle les forces de l’Autorité
palestinienne, fidèles à Mahmoud Abbas, représentent les Palestiniens
aux passages frontaliers. Mais la méfiance entre le Fatah et le
Hamas, surtout depuis le coup de force du Hamas à Gaza en juin
dernier, est exceptionnellement forte. Par exemple, où seraient logés
ces surveillants palestiniens, une fois leur tout de garde terminé ?
Oseront-ils passer la nuit dans la bande de Gaza, sûrs de l’immunité
que le Hamas leur garantirait ?

Pour le moment, le Hamas ne souhaite faire aucune concession. Il
maintient sa position initiale : les officiers du Fatah
s’occuperaient des tâches administratives du côté palestinien, mais
une force armée du Hamas serait également postée sur les lieux.
Solution acceptable ni par Israël, ni par l’Autorité palestinienne,
car cela reviendrait à accorder le dernier mot au Hamas aux passages
frontaliers.

Comme souvent, il est compliqué de se faire une idée claire à partir
des déclarations des porte-parole du Hamas. Des proches d’Ismaïl
Haniyeh tentaient de faire savoir que l’accord était conclu. D’autres
membres du Hamas, qui ne font pas partie du gouvernement, démentaient
et affirmaient que, pour le moment, il n’y avait pas d’accord, ni
avec l’Egypte ni avec Israël.

Du côté de l’armée israélienne, on dit que depuis quelque temps, le
vrai décisionnaire au Hamas n’est plus Ismaïl Haniyeh, ni même Khaled
Mesh’al depuis Damas, mais Ahmed Jabari, qui dirige l’aile militaire
du Hamas. C’est l’homme qui a mené l’opération de la brèche dans la
frontière avec l’Egypte à Rafah en janvier dernier, malgré les
réserves de Mesh’al. Les positions de Jabari sont dures et sans
compromis. Il est peu probable qu’il soit prêt à faire des
concessions sur le plan idéologique.