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Yediot Aharonot, 27 novembre 2006

Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant


Le cessez-le feu entre les Israéliens et les Palestiniens, s’il dure, est une première étape. Il doit être suivi d’au moins trois autres étapes : la libération de prisonniers, la création d’un nouveau gouvernement palestinien qui n’épouse pas la cause de la destruction d’Israël mais celle de la coexistence, et le commencement de négociations pour aboutir à un accord de paix global israélo-palestinien. Ces trois étapes suivront-ils la première? Cela dépendra de la premièe : la trêve.

Peut-être les Palestiniens auront-ils appris à la dure que le bombardement de villes israéliennes ne fait pas avancer l’indépendance palestinienne. Peut-être les Israéliens auront-ils appris que des opérations militaires d’envergure ne font pas taire les Palestiniens.

Actuellement, nous observons des signes qui montrent que le gouvernement du Hamas est dans l’impasse parce qu’il n’a pu apporter aux Palestiniens qu’un siège de la communauté internationale et d’Israël, toujours plus de souffrances et des victimes inutiles. Il y a aussi des signes qui montrent que le gouvernement israélien se rend compte qu’il n’y a pas de solutions unilatérales et qu’il n’y a pas d’autre choix que de tenter de parvenir à un accord.

D’importantes forces, celles des fanatiques des deux côtés, continuent à souffler sur les braises et à condamner tout compromis comme du défaitisme et toute négociation comme un signe de faiblesse. Les fanatiques palestiniens aspirent à la poursuite de la « lutte armée » jusqu’à l’élimination de l’Etat d’Israël. Les fanatiques israéliens exigent du gouvernement qu’il réoccupe la bande de Gaza et bannisse pour toujours toute idée d’évacuation des territoires occupés.

Une atmosphère de désespoir

La spirale du sang entre Israéliens et Palestiniens, et le sentiment qu’il n’y a pas moyen de sortir de cette spirale, ont mené au pessimisme chez les modérés des deux côtés. La faiblesse d’Olmert et de Mahmoud Abas renforce ce désarroi.

Une atmosphère de désespoir s’est emparée du camp de la paix. Beaucoup ont le sentiment que les radicaux ont réussi à noyer dans le sang toute chance de parvenir à la paix. Et cette faiblesse, ce sentiment de désarroi, ne font que renforcer encore davantage les extrémistes des deux côtés.

Mais, si l’on y pense, il y a à peine quelques années, les partisans de la paix ont rempli les places publiques. Ils ont renversé le gouvernement Shamir, puis le gouvernement Netanyahou, et ils ont permis d’ouvrir une lucarne pour avancer vers la reconnaissance mutuelle entre les deux peuples.

Aux dernières élections, il y a à peine quelques mois, des partisans de la paix ont élu un gouvernement de centre gauche qui brandissait l’étendard du retrait unilatéral d’Israël de la plupart des territoires occupés.

Mais, après une attaque du Hezbollah contre Israël, ce gouvernement de centre gauche a lancé une opération militaire au Liban, en faisant de ce qui aurait dû être une campagne brève, limitée et justifiée une guerre longue et pénible. Depuis, ce gouvernement a perdu le désir d’avancer vers une paix avec les Palestiniens. En fait, il a perdu tout désir sauf celui de survivre.

Les Palestiniens, de leur côté, ont été conduits par le gouvernement d’un Hamas minoritaire vers des horizons de radicalisme et de belligérance, sans aucune volonté de reconnaître le droit d’Israël à l’existence. Des positions analogues ont provoqué le grand désastre palestinien en 1948.

Pourtant, ces jours-ci, nous sommes peut-être témoins d’un changement qui émerge des deux côtés. Le sentiment de l’impasse et la crainte du cercle vicieux semblent être partagés. Si le cessez-le-feu prend racine et qu’il est suivi de la libération de prisonniers et de la création d’un gouvernement palestinien pragmatique, nous pourrions être à l’orée d’un nouveau développement. Nous n’avons pas besoin d’une autre conférence internationale, mais plutôt de négociations directes entre les deux parties.

Deux capitales à Jérusalem

Des négociations sur quoi? Pas sur une nouvelle « convergence », ni sur une nouvelle « hudna » ou une nouvelle « tahadiya », mais bien des pourparlers sur un accord bilatéral global qui résoudrait tous les aspects du conflit israélo-palestinien.

De quoi cet accord sera-t-il fait? Ici, de partout, nous trouvons des raisons d’espérer. Nous les trouvons dans le fait que les Israéliens comme les Palestiniens savent, au plus profond de leur coeur, ce que comportera cet accord, et ce qu’il ne comportera pas. Même les opposants des deux côtés à cet accord le savent eux aussi, au plus profond de leur coeur.

Même ceux qui, des deux côtés, considèrent cet accord comme une escroquerie et un désastre, même eux savent, au plus profond de leur coeur, que dans cet accord, il y aura deux Etats, Israël et la Palestine, sur la base des frontières de 1967, avec des ajustements mutuellement acceptés. Il y aura deux capitales à Jérusalem. Et il n’y aura pas de « droit au retour », tout comme la plupart des colonies disparaîtront.

Les deux peuples savent déjà cela. Ont-ils pour cela la joie au coeur? Certainement pas. Les Israéliens et les Palestiniens danseront-ils dans les rues quand cet accord inévitable sera signé? Certainement pas. Nous parlons d’un compromis fait de douleur et de grincements de dents. Pourtant, la bonne nouvelle, c’est que les deux peuples savent que ce compromis les attend au bout du chemin.

De combien de temps encore, de souffrances et de sang innocent les dirigeants d’Israël et de Palestine auront-ils besoin avant de parvenir là où les deux peuples, le coeur lourd, se trouvent déjà? Le cessez-le-feu, s’il tient, pourrait être la première petite lumière qui vacille au bout des ténèbres.