Ha’aretz, 20 novembre 2007

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Les sondages d’opinion indiquent depuis longtemps que la plupart des Israéliens souhaitent mettre fin à l’occupation. Les propos qui suivent s’adressent à l’importante minorité qui n’est pas d’accord.

Le week-end dernier, un malade du cancer de Gaza nommé Nail al-Kurdi, 20 ans, qui attendait depuis juillet l’autorisation d’entrer en Israël pour suivre un traitement, est mort de sa maladie. Pendant cinq mois, le Shin Bet a reçu plusieurs demandes des Médecins pour les droits de l’homme, dont l’objet était que Nail al-Kurdi soit autorisé à être soigné en Israël.

Les demandes ont été refusées les unes après les autres. Raison invoquée : la sécurité. En juillet, il avait été adressé à l’hôpital Ikhilov (Tel-Aviv) pour un diagnostic d’urgence. Les refus se sont accumulés, et le cancer a métastasé. Dans le cas d’al-Kurdi et dans un certain nombre d’autres cas où des Palestiniens gravement malades n’ont pas été autorisés à se rendre en Israël pour s’y faire soigner, l’ONG a soumis les refus du Shin Bet à la Haute cour de justice. La cour a jugé que les demandeurs devaient bénéficier d’un délai, afin que leur cas soit étudié. Nail al-Kurdi n’a pas survécu à ce délai.

Ce cas est important, tout spécialement pour les Israéliens qui souhaitent voir l’occupation se prolonger. Les Israéliens de droite devraient être en première ligne dans le combat pour les droits des gens comme Nail al-Kurdi. Il n’y a pas de mal plus grand que celui de refuser des soins vitaux. Sauf un, peut-être.

Voyons le cas de Y.H., 37 ans, de Gaza, qui a besoin d’une opération à cœur ouvert. Contrairement à al-Kurdi, le Shin Bet a accordé à Y.H. une autorisation de se rendre à Naplouse, en Cisjordanie, pour se faire opérer. D’après les Médecins pour les droits de l’homme, arrivé au point de passage d’Erez pour quitter Gaza, des agents du Shin Bet l’ont pris à part pour l’interroger.

« Si tu nous aides, nous t’aiderons », a dit l’agent d’après Y.H., qui ajoute que l’homme du Shin Bet lui a demandé de fournir des informations sur ses contacts.

D’après le groupe de médecins, quand Y.H. a répondu qu’il n’avait aucune information de ce genre, l’interrogateur a dit : « Si tu ne nous aides pas, nous ne t’aiderons pas. Va mourir à Gaza. » Ils le renvoyèrent chez lui, en lui promettant qu’il ne quitterait jamais Gaza.

Peut-être êtes-vous de ceux qui veulent que l’occupation continue parce qu’ils pensent que les Arabes, et le monde musulman en général, n’accepteront jamais l’existence d’un Etat juif, et qu’un Etat palestinien indépendant servira de base à des attaques incessantes contre Israël.

Si c’est le cas, vous devez vous battre pour les droits des Palestiniens.

Peut-être êtes-vous de ceux qui, guidés pas la Bible ou une sorte de sionisme révisionniste, pensent que les frontières d’Israël doivent comprendre toute la Terre sainte, de la Méditerranée au Jourdain.

Si c’est le cas, vous, plus que d’autres, devriez œuvrer à ce que les Palestiniens reçoivent l’aide dont ils ont besoin.

Peut-être êtes-vous de ceux qui, ardemment, de tout votre cœur, sont aux côtés des colons et veulent voir leur entreprise prospérer et devenir définitive. Peut-être êtes-vous de ceux qui refusent tout droit aux Palestiniens à une patrie et même à constituer un peuple.

Vous, plus que quiconque, devriez veiller jalousement à ce que les Palestiniens qui vivent parmi vous soient traités avec le respect et le soin que vous accordez à tout être humain. Le même que vous accordez à un juif.

Pour ce qui concerne nous autres, qui ne sommes pas d’accord avec vous, la lutte pour les droits des Palestiniens comprend tout cela. Mais en plus, elle comprend la lutte pour démanteler l’occupation avant qu’elle ne démantèle l’Etat d’Israël.

A droite, nombreux ont été ceux qui ont dit qu’il était beaucoup trop tard pour mettre fin à l’occupation.
A gauche, nombreux sont ceux qui craignent qu’ils n’aient raison.

Mais pendant ce temps, l’occupation continue de tuer des innocents, et pas seulement parce qu’ils ont l’infortune de se trouver entre deux feux. Beaucoup trop souvent, l’occupation tue parce que nous – droite et gauche confondues – ne faisons pas grand-chose pour l’empêcher. Nous sommes devenus trop habitués à laisser grossir des cancers sans traitement, en particulier quand ils s’attaquent à notre conscience.