[->http://www.ynetnews.com/articles/0,7340,L-3281556,00.html]

Yediot Aharonot, 26 juillet 2006

Trad. : Gérard Eizenberg pour La Paix Maintenant


Plus Israël s’enlise dans les combats contre le Hezbollah, plus il est clair que depuis des dizaines d’années, alors qu’Israël s’est épuisé dans le conflit avec les Palestiniens, sa capacité de dissuasion militaire s’est tellement affaiblie que cela en devient inacceptable.

Cela a été dit et répété de nombreuses fois, mais nous ne pouvons plus en ignorer les conséquences. Depuis des dizaines d’années, Israël sacrifie son sang et son économie dans l’affrontement avec les Palestiniens, et ce conflit occupe la meilleure partie de nos réflexions et de nos débats.

Depuis près de 40 ans, le développement d’Israël en tant que nation, société et Etat s’est fourvoyé dans une voie stérile et erronée qui I’a conduit à l’impasse. Une grande partie du débat public en Israël tourne autour de la question de l’occupation, ou du moins autour de questions qui lui sont liées.

D’autres débats tout aussi importants, et le traitement sérieux de vrais problèmes et de vrais dangers qui menacent réellement Israël, ont été mis de côté.

Débattre du désengagement

Pensez à la manière dont le débat sur le désengagement de Gaza de l’année dernière nous a minés. A la quantité d’argent gâché sur le processus, sur les indemnités versées aux colons qui de toute façon n’avaient rien à faire là. Nos politiciens ne pouvaient-ils le prévoir ?

Pensez aux heures perdues à entraîner les soldats à évincer des bébés et des adolescents en pleurs, gentiment mais fermement, au lieu de les entraîner à combattre des groupes comme le Hezbollah.

Je suis quelqu’un de simple. Je n’ai pas d’autres informations que celles que diffusent les médias. Mais je suis inquiet. Qu’allons-nous faire le jour où nous devrons affronter une menace bien plus importante et complexe que ce que nous avons connu jusqu’à présent, si notre armée n’est pas prête parce qu’elle a passé des dizaines d’années à faire la police de l’occupation ?

Préoccupés par l’occupation

Toutes ces années, Tsahal s’est occupé d’affrontements avec des civils palestiniens et avec des colons.

Toutes ces années, notre sang a été versé pour l’occupation, ses conséquences et ses hallucinations. L’occupation est devenue le projet national, économique et identitaire le plus important qu’Israël a jamais connu.

Les derniers développements rendent encore plus urgent un accord avec les Palestiniens. Il faut en finir avec l’occupation, non pas parce que cela sera « bon pour les Palestiniens », mais parce ce n’est qu’ainsi qu’Israël pourra très vite s’occuper des problèmes militaires et diplomatiques qu’un pays si fragile doit affronter.

C’est la seule manière pour le pays de retrouver assez d’énergie, de se « libérer la tête », pour se préparer face aux menaces existentielles qui pèsent sur lui.

De durs moments nous attendent

Ne nous y trompons pas : la fin de l’occupation ne nous attirera l’amour de personne au Moyen-Orient. Même après, Israël demeurera un implant étranger dans la région aux yeux de la plupart des pays arabes.

Un accord raisonnable avec les Palestiniens réduira les flammes qui attisent la plupart de nos points de conflit, permettra à Israël de panser ses blessures de l’intérieur et rappellera aux Israéliens ce pour quoi il vaut vraiment la peine de se battre.

Malheureusement, Israël devra parvenir à un accord avec le Hamas, au moins pour conclure un cessez-le-feu sur plusieurs années. Solution partielle et problématique. Mais elle vaut quand même mieux que le statu quo actuel.

Est-il si déraisonnable de prédire que si nous ne trouvons pas rapidement une solution quelconque, même partielle, au conflit avec les Palestiniens, nous pourrions nous retrouver dans quelques années à regretter le Hamas d’aujourd’hui (un groupe avec lequel nous pouvons parvenir à un accord, comme ne cesse de le répéter Ismail Haniyeh) ?

Aujourd’hui, le moment est venu pour Israël d’initier un nouveau processus avec tous les secteurs et toutes les factions du peuple palestinien. Nous devons présenter des propositions sérieuses qui offriront aux Palestiniens la perspective de nouveaux défis et de nouvelles opportunités, et les forcer à décider s’ils veulent parvenir avec nous à un compromis pour vivre en paix, ou s’ils souhaitent rester captifs d’un gouvernement fanatique et fondamentaliste.

Des différences fondamentales entre les deux fronts

Les actions guerrières et sans compromis du Hezbollah ont fait naître chez beaucoup d’Israéliens le sentiment que les deux fronts sur lesquels Israël combat n’en font qu’un, et qu’ils constituent tous les deux une menace existentielle. Or, alors que le Hezbollah est voué à la destruction d’Israël, la plupart des Palestiniens se sont résignés (certes, sans joie excessive) à l’idée de l’existence d’Israël et de la nécessité de partager cette terre.

La plupart des Israéliens et des Palestiniens comprennent que leurs sorts sont liés. Les deux peuples ont un intérêt clair à parvenir à un accord et à un compromis sur les principes les plus essentiels. Il est clair pour les deux peuples qu’au bout du compte, ce conflit n’a pas de solution militaire.

L’écrasement brutal de la bande de Gaza se poursuit inutilement. D’après certaines informations, même les organisations palestiniennes les plus extrémistes sont prêtes à conclure un cessez-le-feu. Il serait sage de la part d’Israël de proposer d’entamer des négociations, même avant la fin des combats avec le Hezbollah. Cela montrerait aux Palestiniens et au monde qu’Israël fait la différence entre les deux fronts. Et sa position sur ces deux fronts s’en retrouverait brusquement améliorée.